L’hypnose a été identifiée comme l’une des modalités de la conscience éveillée dès les années 50 par l’EEG. Les recherches réalisées grâce au Pet-scan ont permis de montrer un fonctionnement cérébral spécifique du processus hypnotique (6). Lors d’une expérience sur un phénomène visuel par exemple, l’activation cérébrale concerne les mêmes zones occipitales que lors de la visualisation réelle. Ceci atteste physiologiquement d’une différence fondamentale d’avec la rêverie et la remémoration d’un souvenir. Plus récemment encore, d’autres recherches montrent l’activation de phénomènes de neuro-génèse attestant la dynamisation de la plasticité cérébrale. Pendant les phases hypnotiques, de nouveaux gènes seraient activés. Selon Ernest Rossi (7), les phénomènes psychologiques (hypnose) ou sociaux (relations entre individus) ont un impact sur l’activation ou la répression de certaines parties du génome.
La dépression vue par l’hypnothérapeute
Aiguë ou chronique
--› Les signes cardinaux de la dépression sont aujourd’hui bien connus et décrits dans le DSM IV-R, dans les recommandations de l’ANAES. L’angoisse est souvent associée et peut même en être le signe majeur. Selon la durée des troubles, nous parlerons de dépression aiguë ou chronique.
--› Par analogie, notre expérience auprès des patients douloureux chroniques puis de la pratique de l’hypnose en douleur aiguë (8) nous a permis d’observer d’autres différences, notamment en termes de stabilité et d’instabilité des symptômes, qui distinguent les dépressions aiguës des dépressions chroniques. Le trouble chronique tend à être stable, désespérant pour le patient et les soignants avec une succession d’échecs thérapeutiques. Dans la phase aiguë, la symptomatologie est très instable. L’intensité des troubles ainsi que la présence de certains symptômes (envie de mourir, troubles alimentaires, insomnie, désintérêt) peut varier d’un jour à l’autre, d’un instant à l’autre.
Le climat d’imprévisibilité, de perte de repères et de contrôle sur l’avenir à très court terme sont très impliqués dans l’angoisse. La symptomatologie devenant de plus en plus intense, le patient a besoin d’être reçu rapidement.
Circonstances d’apparition du trouble aigü
--› La dépression peut survenir à l’occasion d’événements de vie imposant une adaptation mentale. Ces événements sont soit imprévisibles (licenciement, annonce de maladie, décès, séparation, expropriation, agression...), soit prévisibles (éloignement familial, fin des études, retraite), mais il peut aussi s’agir d’événements « heureux » (grossesse, promotion, chance au loto).
--› Un piège : dans certains syndromes, mêmes sévères, aucune circonstance n’est repérée. En fait ces patients étaient déjà, parfois depuis longtemps, au bord de l’effondrement. Le facteur déclenchant peut alors être minime avec des conséquences très supérieures à la cause. On l’appelle effet non-linéaire. Cet effet de «lacet qui casse» est aujourd’hui largement décrit dans le Burn-Out.
La dépression aiguë, une crise adaptative ?
Les systèmes vivants passent par des phases d’instabilité dite chaotique (9) lorsqu’il n’y a plus de solution pour s’adapter. Beaucoup d’énergie est mise en jeu, mais elle semble incontrôlable. Apparaît alors une grande incertitude sur la capacité à retrouver un équilibre et des réponses adaptatives.
L’intensité s’étend des formes minimales jusqu’aux plus sévères. Dans cette phase souvent courte, de quelques heures à quelques semaines, la consultation survient lorsque l’intensité est d’emblée majeure ou lorsque le trouble se prolonge.
Le système (individu, famille, entreprise...) doit modifier son fonctionnement. L’énergie est utilisée vers ce but avec une apparente inefficacité (ruminations) (10), jusqu’à ce qu’une appréhension nouvelle de la situation apparaisse. La phase chaotique s’achève, l’ordre revient dans la vie du sujet, différent de ce qu’il était auparavant. Il y a eu un changement adaptatif (11,12).