Comment faire?
Il peut augmenter la confiance du patient dans la thérapie en créant une bonne alliance, en augmentant l'anticipation d'un bon résultat.
Il peut aussi changer le sens du problème, en lui montrant ,par exemple, la relativité de son problème ou bien le fait qu'il n'est pas aussi fréquent qu'il ne le pense .
Il peut lui montrer aussi que l'objectif qu’il cherche à atteindre est beaucoup plus modeste qu'il ne le pensait .
Il peut l'amener aussi à se rendre compte que le cadre dans lequel il pensait son problème ne lui permettait pas d'envisager une solution, soit parce que toutes les tentatives qu'il fait pour trouver une solution sont nécessairement vouées à l'échec s'il continue toujours à chercher la sortie du côté de la lumière comme le papillon va vers la lampe, soit parce qu'il l'amène à comprendre que son cadre de référence n'est pas le même que celui de tout le monde.
Par exemple, une patiente fibromyalgique, à partir de l'idée d'être prisonnière de son propre corps, pourra avoir l'image d'un être minuscule enfermé dans la cage de son corps. Chacun comprendra qu'avant de s'occuper du corps, il vaudra mieux s'occuper de cet être minuscule en détresse.
Bref, le thérapeute va tenter d'amener le patient sur un nouveau terrain où il va être plus facile de gérer la difficulté.
« Veux-tu jouer avec moi? »… « On dirait que... » disent les enfants avant d'entrer dans le monde magique d’un jeu accepté par les protagonistes. Peut-être que la thérapie n'est que cela, un jeu de langage, disent certains.
Quelles sont les idées que je souhaite faire passer ?
Je souhaite vous transmettre l'idée, partagée par notre groupe de Nantes (AREPTA -- institut Milton Erickson), que le champ d'intervention de l'hypnose et des thérapies brèves est le même, de la même façon qu'il est absurde de penser hypnose sans penser stratégie. En l'absence de celle-ci, l'hypnose n'est qu'un sac vide.
Les unes et les autres pratiques nécessitent de créer un nouvel espace virtuel, sécure et magique, un espace de jeu, au sein duquel les opérations de négociation du changement vont avoir lieu.
L'opération fondatrice de cet espace est le recadrage dont l'acceptation va être un puissant facteur d'alliance.
La force de l'alliance thérapeutique, du transfert, diraient certains ,va permettre l'acceptation collaborative de la possibilité du changement .
L'opérateur du changement sera dans tous les cas, qu'il s'agisse d'hypnose ou d'autres thérapies, une expérience émotionnelle correctrice, inductrice de changements comportementaux et cognitifs.
Qu'elle se produise d'une façon imaginaire ,puis réelle ,dans le cadre de l'hypnose, ou bien de façon réelle, puis imaginaire ,dans le cadre des prescriptions et tâches des thérapies brèves ou stratégiques , je reste toujours émerveillé que la transformation de ce qui n'est ,au départ ,qu'une suggestion ,en expérience émotionnelle et comportementale correctrice puisse ancrer la possibilité du changement et l'inaugurer tout simplement parce que le thérapeute et le patient auront co-créé un espace « magique » dans lequel les mots, les émotions , le représentations ont le pouvoir de tracer de nouvelles cartes et de nouvelles réalités.
Souvent, savoir recadrer une plainte, savoir négocier un objectif, savoir créer l'alliance, savoir permettre une expérience émotionnelle correctrice, sont des savoir-faire qui apparaîssent aux débutants comme étant des pratiques bien difficiles dont la maîtrise est réservée à quelques «génies », ce qui fait que beaucoup cessent rapidement ces pratiques au profit de, quelquefois, faire plus ce qui ne marche pas.
Je me propose d’essayer de faire passer l'idée que tout ceci n'est peut-être pas si inabordable que cela, que ceci peut relever de l’apprentissage technique et de l’entraînement plutôt que du génie, et est accessible même à des êtres humains ordinaires, à la condition qu’ils soient de bonne volonté et déjà sensibles à l’enrichissement qu’apporte la relation à l’autre.
Surtout, grâce à ces bases bien comprises, il devient tout à fait possible de comprendre comment passer facilement d'une modalité d'hypnose à une modalité de thérapie brève ou stratégique, et réciproquement. Ceci ouvre à la possibilité de créer des stratégies thérapeutiques dans le meilleur des cas, ou bien, au minimum, à la possibilité de faire autre chose quand ça ne marche pas , sans pour autant donner l'impression aux patients d'une démarche non cohérente.
Je me permettrai donc d'aborder devant vous quelques idées concernant la construction de l'alliance thérapeutique, la construction d'un recadrage .
L'alliance « thérapeutique »
En rassemblant les principaux résultats des chercheurs dans le monde autour du sujet de l'évaluation de la thérapie, Miller arrive à la conclusion que les résultats d'une thérapie sont liés pour 40 % à des facteurs liés au client, à 30 % à la qualité la relation avec le thérapeute, à 15 % aux espoirs et aux attentes du patient ; reste seulement 15 % pour la technique quel que soit le modèle.
Les facteurs liés au patient regroupent globalement tout ce que nous appelons les ressources ,qu'il s'agisse des expériences positives passées, des valeurs , ou bien des ressources du contexte.
La qualité de la relation, ce que nous pouvons appeler aussi l'alliance thérapeutique est l'évaluation par le patient de la qualité du partenariat avec le thérapeute. Bien sûr, l'alliance n'est pas naturelle et il apparaît essentiel que le thérapeute sache aider à construire la meilleure relation et, ce qui est le plus difficile, à la maintenir sans perdre le patient , même si c'est pour continuer à avoir raison.
Les attentes sont ,bien sûr ,très liées à la vogue médiatique de telle ou telle thérapie ou bien à la séduction que tel ou tel modèle opère auprès du patient. Mais l'attente, c'est également celle que saura créer le thérapeute en permettant par exemple l'anticipation. Dans tous les cas , pensez à la puissance de l'effet Pygmalion et ne le négligez pas ...
Quant à la technique psychothérapique elle-même, il est finalement très réjouissant de se rendre compte qu'elle n'est pas si essentielle, qu'il n'y a pas de modèle qui justifie de se battre et de créer des chapelles d'exclusion. Nous connaissons tous de bons psychanalystes, de bons thérapeutes de tous horizons, nous en connaissons même certains qui nous semblent très mauvais et qui aident positivement leurs patients contre nos attentes.
Je ne veux pas dire qu'il faille pour autant mépriser la technique qui sous-tend très souvent une représentation de la relation, voire du monde, très utile pour une bonne qualité de relation . Surtout, elle permet au thérapeute de se sentir à l’aise dans la relation grâce à cet outil, j'aurai donc tendance à penser qu'il vaut mieux avoir de très nombreux outils dans sa boîte pour mieux répondre aux attentes du patient et permettre au thérapeute de continuer à se sentir confortable en toutes situations.