Dans une de ses cliniques, M. le professeur Bernheim prononçait récemment cette affirmation :
Tous les enfants sont suggestibles, c’est-à-dire susceptibles d’être soumis à la suggestion hypnotique. En effet, les enfants, depuis l’âge de raison, s’hypnotisent en général très facilement. Il suffit souvent de leur fermer les yeux, de les tenir clos pendant quelques instants, de leur dire de dormir, puis d’affirmer qu’ils dorment.
Ce n’est pas seulement dans l’état de sommeil que la suggestion agit sur l’enfant comme sur l’adulte ; elle agit aussi à l’état de veille.
Et ce n’est pas là la moindre partie de l’œuvre de l’Ecole de Nancy que d’avoir mis en lumière ce fait capital. Un des caractères du sommeil hypnotique, c’est l’automatisme dans lequel se trouve l’individu endormi.
Par la suite de l’inertie passagère de sa volonté, il subit toutes les impulsions qu’on lui donne. A l’état de veille, le sujet peut se trouver de lui-même dans un état où il est disposé à accepter les affirmations, sans aucune réaction et sans aucun contrôle de sa volonté ni de son esprit.
Mais il est encore d’autres cas où, l’absence de toute suggestion venant d’autrui, l’individu agit sous l’influence de suggestions qu’il se fait involontairement à lui-même. Ces auto-suggestions sont le résultat de l’imitation.
Les faits d’imitation prennent naissance chez tout le monde, cependant l’enfance est l’âge où l’on est le plus prédisposé à les accomplir. Ils se développent à l’état de veille dans les moments où la faculté d’attention, encore mal exercée ou fatiguée, cesse d’être vigilante.
Tout ce que nous venons de dire n’impose-t-il pas aux éducateurs la nécessité d’étudier de plus près qu’il ne l’ont fait jusqu’à ce jour l’influence de la suggestion et de l’imitation sur l’éducation des enfants.
Dès à présent, les observations que nous connaissons nous permettent de formuler quelques conclusions pratiques :
Lorsqu’on se trouvera en présence d’enfants simplement paresseux, indociles ou médiocres, on se bornera à faire sur eux des suggestions verbales, à l’état de veille. Pour quelles aient quelque efficacité, il sera utile de se mettre dans les mêmes conditions que les expérimentateurs de Nancy et en particulier M. Liébault.
Il faudra s’efforcer d’inspirer la plus grande confiance à l’enfant, l’isoler, lui mettre la main sur le front, lui faire les suggestions voulues avec douceur, avec précision, avec patience.
Lorsqu’on aura à se préoccuper de l’avenir d’enfants vicieux, impulsifs, récalcitrants, incapables de la moindre attention et de la moindre application, manifestant un penchant irrésistible vers les mauvais instincts, nous pensons qu’il n’y aura aucun inconvénient à provoquer l’hypnotisme chez ces créatures déshéritées.
Pendant le sommeil hypnotique les suggestions ont plus de prise. Elles ont un effet durable et profond. Il sera possible dans bien des cas, en les répétant autant que cela sera nécessaire, de développer la faculté d’attention chez ces êtres jusqu’alors incomplets, de corriger les mauvais instincts et de ramener au bien des esprits qui s’en seraient écartés infailliblement.
En terminant, je n’hésite pas à déclarer que, autant il y aurait d’inconvénients à pratiquer l’hypnotisme chez des sujets excellents, bien portants, autant il y aura d’avantages à l’appliquer, comme moyen pédagogique, à des sujets mauvais, vicieux ou malades.
Je dois ajouter que l’emploi de ce procédé sera surtout indiqué dans les cas où tous les autres moyens rationnels d’éducation auront échoué. Il devra toujours être appliqué sous la direction d’un médecin compétent et exercé.
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