L'hypnose se base sur deux choses. Tout d'abord, on a créé un état modifié de conscience dans lequel on perçoit autrement la réalité. C'est un état naturel dit de dissociation : on est toujours présent mais notre esprit est ailleurs. Lorsque vous regardez un film ou si vous êtes absorbé à regarder des vagues, vous pouvez approcher cet état. Vous êtes ici et ailleurs à la fois, vous perdez la notion du temps. La deuxième chose, c'est l'accompagnement de la personne qui s'apprête à plonger dans cet état avec la forme de communication particulière que cela sous entend. On sait par exemple qu'un cerveau n'entend pas la négation. On ne dira donc pas «ne soyez pas stressé» et on ne prononcera pas le mot «douleur» pour ne pas provoquer de l'anxiété chez le patient.
Qu'est ce que l'état hypnotique ? A quoi peut-on le comparer ?
C'est une forme de rêve éveillé. L'état hypnotique provoque une sensation de détente mentale très importante. Le patient est conscient, mais développe une grande capacité d'absorption de l'attention sur une histoire. Les gens qui entrent dans cet état en ont conscience. Parfois, ils disent que c'était comme s'ils dormaient, car ils perdent toute notion du temps. Deux heures peuvent leur paraître 5 ou 10 minutes. Ils sont également soumis au principe dit involontariste. C'est-à-dire qu'ils ont l'impression que les choses arrivent naturellement sans qu'ils interviennent. Si je leur demande de lever la main, les personnes auront l'impression qu'elles ne sont pas intervenues dans le processus et que les choses se font malgré elles. Automatiquement. Mais tous les patients disent que c'est un état curieux, mais très confortable.
Que devient notre cerveau sous hypnose ?
C'est en 1999 que l'on a décrit pour la première fois ce qu'il se passait et qu'on attestait objectivement de la véracité de son existence. En fait, l'hypnose permet d'activer simultanément la zone de relaxation, et celle de l'attention.
Le thérapeute peut-il influencer inconsciemment son patient ? Peut-il y avoir manipulation ?
Oui il y a une influence. Mais ceci est vrai dans tout processus de prise de soin, toute relation entre un médecin et son patient puisque ce dernier consulte parce qu'il est fragilisé. Par contre on sait aujourd'hui que le patient n'est pas sous le joug de son praticien durant une hypnose. Il garde au contraire son libre arbitre. Si quelqu'un ne veut pas entrer sous hypnose, il n'y rentrera pas. Il garde le contrôle de la séance.
Se souvient-on de tout après une séance d'hypnose ? Peut-il se produire des accidents ?
Oui, il n'y a pas d'amnésie. Si on pose des questions au patient, il peut reconstruire entièrement la séance. Tous les patients reviennent d'eux-mêmes à un état ordinaire de conscience. Il n'y a que dans les films ou l'on peut dire un mot-clé par téléphone, et que cela déclenche une réaction donnée ! La seule chose qui puisse arriver, c'est de retrouver des souvenirs désagréables, des sensations fortes. C'est pour cela qu'il est très important d'être suivi par un spécialiste de la santé physique ou psychique, qui sera en mesure de gérer cette situation.
En dehors de la thérapie, quels sont les autres domaines d'applications de l'hypnose ?
Le domaine le plus développé actuellement est celui de la prise en charge de la douleur, qu'elle soit post-opératoire, classique, ou en fin de vie. Elle couvre aussi beaucoup le champ de l'anxiété et de la phobie, et peut servir dans le cas des addictions (alcool...).
Y a-t-il des personnes résistantes à l'hypnose ?
D'un point de vue théorique non. Tout le monde est accessible. C'est un état banal, dans lequel nous sommes tous capables d'être quand notre esprit vagabonde. Mais tout le monde ne rentre pas en hypnose de la même façon. Ce sera simple pour 80% des patients. Pour les 20% restants, ce sera plus compliqué s'ils ont peur de perdre le contrôle ou qu'on essaie de prendre le dessus. Dans ces cas-là, il faudra employer des techniques moins directes pour les mener à l'hypnose ou leur indiquer d'autres formes de thérapies.