L’étymologie grecque du mot empathie peut facilement entraîner un contresens : εν ou em- : « dans, à l’intérieur », et πάθoς ou pathos : « souffrance, ce qui est éprouvé ». Ce terme a en fait été créé en allemand par Robert Vischer en 1872, c’est l’Einfühlung : « ressenti de l’intérieur ». Il désigne « le rapport qu’entretient un sujet avec une œuvre d’art, lui permettant d’accéder à son sens ».
Autrement dit, si vous êtes capable de contempler votre patient autant que vous le feriez devant une œuvre d’art, sans aucun jugement, mais une grande présence, alors apparaîtront de nombreuses perceptions que, par votre sens clinique, vous saurez retranscrire en propositions dans la séance d’hypnose. Ici commence, dans une complexe simplicité, l’empathie clinique...
Car passant de l’art à la philosophie, Theodor Lipps en 1903 affirme qu’un sujet est capable d’attribuer des sensations et des émotions aux autres, semblables aux siennes, à la seule reconnaissance de la forme. En somme l’expression corporelle d’un individu dans un état émotionnel déclencherait de façon spontanée ce même état émotionnel chez un observateur (ouvrant déjà la porte à l’idée des neurones miroirs, un siècle avant !).
Entrons dans le récit clinique de ce patient pour comprendre en quoi empathie et sympathie ne riment pas, et combien on peut apprendre de situations bien surprenantes. Je fais appel à votre sagacité et votre plus profonde tolérance pour lire ce récit qui pourra vous rendre sensible...
Un ami et collègue psychiatre m’adresse Monsieur Z., sans m’en dire mot, comme nous le faisons à l’accoutumée. Je vais à sa rencontre, et, entrant dans la salle d’attente, le premier mot qui me vient quand j’observe l’expression corporelle de cet homme est... puant. Non pas un jugement, entendons-nous bien, mais une perception clinique tout au plus, une intuition dans tout les cas. S’installant sans un mot de façon lascive, ou plutôt glissant de tout son long dans le fauteuil, il va m’exposer son histoire que je vous restitue en conservant les « propres » mots de ce patient :
- « Je viens vous voir car je pue. Quand je suis en contact avec des personnes qui m’incommodent, ça peut être n’importe où, voyez, je me mets à puer.
- Mais c’est-à-dire, vous transpirez ?
- Ah non, je pue la merde. C ’est comme si mes sphincters s’ouvraient, et je sens la merde.
En ces termes. Je sens que je mets les pieds dans un terrain glissant...
- Mais cette odeur est- elle perceptible ? En avez-vous des preuves ?
Erreur, dans le trouble, je remets en question sa plainte. Mais il me fallait explorer l’éventualité d’un délire psychotique.
- Bien sûr, je le vois, à leur attitude. Leur façon de faire. Ils s’éloignent. J’ai pas besoin de leur demander.
J’ai vu tous les psychiatres et thérapeutes. Ils me maintiennent bien dans mon problème, car je viens, je leur parle, depuis des années, je leur donne mon argent. Beaucoup. Car je suis très gentil, très docile.
Ma vie se résume à l’échec total. Je ne suis rien, mon travail ne m’intéresse pas, pourtant j’y ai beaucoup de pouvoir. Ma famille ne peut rien, ni personne, car je suis puant. Je suis le syndrome du putois, sans même avoir eu le génie d’être le premier à le décrire.
Et je souffre docteur, je souffre de ma profonde médiocrité. »
Près d’une heure de ses diatribes va s’écouler durant laquelle il vomit les relations où on abuse de lui, autant qu’il souligne n’avoir « n’avoir aucun intérêt pour quiconque, les trouvant désespérément nuls, encore plus que ma propre médiocrité à tout, dans cette tranquillité de merde dans laquelle je me vautre allègrement ».
Avachi dans le fauteuil et me fixant d’un air sordide, son attitude physique est glaçante. Il suscite le rejet, physiquement et moralement. Il cherche à m’attirer dans son mode de fonctionnement, dans une relation non thérapeutique mais perverse. Je suis déstabilisé. Il vient pour renforcer sa conviction d’être rejeté et mettre en échec le thérapeute. Le symptôme qu’il expose est tellement invraisemblable et dérangeant que je sens le piège de se focaliser dessus. Il aurait été aussi facile de le raccompagner à la porte que totalement inutile de lui proposer une quelconque induction « normale ». L’hypnose doit venir autrement, en faisant sortir de cette situation.
Ce numéro est sous le signe du vivant, du vital. Tout d’abord grâce à notre artiste : Mario René Madrigal. Ce peintre né au Nicaragua, avant de se révéler au Costa Rica, exprime une continuité entre les temps du précolombien et les temps actuels. Il opère ces liens au travers de la symbolique et les couleurs qu’il utilise.
Je propose quotidiennement des séances de sevrage tabagique en me servant de mon statut assumé de fumeur. J’aime fumer ! Il s’agit dans la structure d’intervention que je souhaite partager avec vous d’une sorte de recette universelle. A vous de l’adapter individuellement à chacun de vos patients et d’en faire « du sur-mesure » comme nous l’ont enseigné Erickson et ses disciples.
En neurochirurgie certaines procédures, en particulier de type fonctionnel, méritent des états alternant entre la sédation/analgésie (moments inconfortables et/ou douloureux) et l’état de conscience critique, afin d’évaluer l’efficacité de la procédure chirurgicale : électrode correctement placée, amélioration des symptômes lors de la stimulation corticale ou médullaire, et absence d’effets indésirables lors de la stimulation/résection chirurgicale.
Depuis quelques années je travaille en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), où je pratique l’hypnose dans ma fonction d’infirmière, et je travaille également en cabinet. Il m’est arrivé assez fréquemment de rencontrer des personnes atteintes de sclérose en plaques. La sclérose en plaques, ou SEP, est une affection du système nerveux central. Elle touche le cerveau, le cervelet et la moelle épinière qui ont en commun d’être constitués de cellules spécifiques, les neurones.
Les grands penseurs sont fascinants. Leurs textes contiennent des ouvertures et des avancées à n’en plus finir. A chaque lecture et relecture, un nouveau concept apparaît. Ils vont à l’essentiel. Ils sont lus par une multitude qui y trouve son compte. L’écriture est précise. Chaque mot est pesé, choisi. Les textes et ouvrages de François Roustang sont de cette veine. "François a enseigné, a beaucoup écrit, fut beaucoup lu, mais se sentait peu compris", nous rappelle Gaston Brosseau depuis Montréal.
C’est une amie qui m’a fait découvrir François Roustang. A une époque de sa vie où elle allait très mal, elle avait acheté La fin de la plainte, un livre destiné à un large public, mais aussi adressé aux professionnels de la relation d’aide, raison qui avait certainement guidé le choix de cette intellectuelle qui cherchait des pistes pour sortir de sa souffrance, mais qui n’aurait jamais, au grand jamais, daigné acheter ou même feuilleter un livre de développement personnel.
« De l’insoutenable légèreté de l’être » : c’est en ces mots que François Roustang évoque lors d’un de nos derniers entretiens, à l’aube de ses derniers jours en guise peut-être de clôture de son œuvre, l’essence de la vie qu’il nous invite inlassablement à contacter, dans une forme de présence au monde libre, intense, fluide. François Roustang sans relâche incite, propose, impose même de s’installer dans la vie telle qu’elle est, dans cette « légèreté de l’être, insoutenable parfois ».
En octobre 1995 François Roustang donne une conférence à la Fondation Ling de Lausanne : « Pourquoi notre culture se méfie-t-elle de l’hypnose ? ». Cette conférence est publiée dans Feuilles oubliées, feuilles retrouvées en mai 2014 par Payot. Dans ce texte, il souligne que « notre époque accueille relativement volontiers l’hypnose lorsqu’elle est capable de produire des effets d’anesthésie ou d’analgésie, c’est-à-dire lorsqu’elle nous coupe des stimuli afférents qui pourraient être cause de douleur… ».
Après avoir exploré durant de nombreuses décennies l’expérience de vivre en ce monde avec les êtres vivants, permis à ceux qui en souffrent de la vivre mieux, évité d’échouer sur les écueils mortifères de la modernité, François Roustang a, tout au long de son cheminement, laissé de précieux indices sur l’expérience de vivre. Son parcours l’a conduit dans tous les domaines où elle peut être explorée, comme dans l’institution spirituelle religieuse, la psychologie, la psychanalyse, la philosophie puis l’hypnose thérapeutique.
Le début des années 1980 a été marqué par l’arrivée sur la scène thérapeutique de l’importance de l’œuvre de Milton Erickson, avec la publication en 1984 en français du livre de Jay Haley, Un thérapeute hors du commun. L’entrée de l’hypnose thérapeutique en France a été facilitée par les formations mises en place par Jean Godin et Jacques-Antoine Malarewicz. Mais si l’hypnose thérapeutique a pu être accueillie comme une pratique et également comme une pensée, elle le doit au travail théorique effectué par François Roustang depuis la publication de Suggestion au long cours en 1984.
Je me suis bien préparé pour cette marche à la montagne. Je le sens. J’avance à un rythme régulier. La première partie est une étape d’exploration : un nouveau paysage, des repères à fixer, une évaluation de la difficulté, le choix du bon chemin. Peu à peu, le terrain devient plus irrégulier, la pente commence à se faire sentir. Pendant cette deuxième étape, nous marchons en file indienne à une cadence qui convient à chacun du groupe. Nous avons, au fond, presque le même entraînement.
Bonne nouvelle, ça pousse le facteur... « Le vent dans le dos » : l’expression est lancée dans la discussion, elle se pose sur la table. Il amène des lettres du bout du monde. Au fait, de quel bout s’agit-il ? C’est un restaurant « branchouille » où se rassemblent les amis, dans une ambiance qui éveille le regard. Du monde peuplé d’amis, de chaleur et de lumière. Ah, comme c’est bon dans le corps ces lettres... lire ces mots adressés.
Chers lecteurs, continuons notre exploration. Certains patients nous surprennent, parfois nous tourmentent, et même nous heurtent. Nous nous efforçons alors de parler d’empathie. Selon Carl Rogers : « Etre empathique, c’est percevoir le cadre de référence interne d’autrui aussi précisément que possible et avec les composants émotionnels et les significations qui lui appartiennent comme si l’on était cette personne, mais sans jamais perdre de vue la condition du “comme si” ».
Les liens entre la méditation et l’hypnose suscitent beaucoup de questionnements. Je n’avais aucune pratique méditative lorsque j’ai décidé d’aller en faire l’expérience, en immersion, lors d’une retraite de dix jours pendant laquelle j’ai pratiqué la méditation Vipassana. Cette technique, également décrite comme un « art de vivre », propose d’apprendre à « voir la réalité telle qu’elle est » en passant par une exploration de soi fondée sur l’observation des sensations physiques.
Pouvez-vous nous parler de votre parcours personnel ? Joyce Mills : Enfant, je racontais déjà des histoires. Mon fils aîné fut atteint de paralysie cérébrale, ce qui m’a conduit à m’intéresser à un programme pour les enfants dans sa condition. J’obtins mon doctorat en 1982 et en 1992 nous avons déménagé à Hawaii. Dix jours après notre arrivée, l’île fut touchée par un ouragan, le pire désastre naturel de cette région au XXe siècle. Cet événement a changé ma vie et mon travail.
Notes de lectures par Christine Guilloux. Vous souvenez-vous d’avoir vu passer le gorille ? Ou vous est-il passé sous le nez sans que vous n’y preniez garde ? Vous riez jaune. Votre attention a été détournée, absorbée par une tâche et vous n’avez eu d’yeux que pour la tâche qui vous était assignée. Rappelez-vous, vous assistiez, sur une vidéo, à un jeu de basket entre deux équipes, l’une habillée en tee-shirts blancs, l’autre en tee-shirts noirs, et vous aviez à compter le nombre de passes entre les joueurs de l’équipe des blancs.
Notes de lectures par Gérard Fitoussi. Dans un des ouvrages de références de l’hypnose, « Hypnotic suggestions and metaphors » de D. Corydon Hammond, où sont répertoriées nombre de propositions concernant l’utilisation de l’hypnose dans une variété de troubles, y compris les troubles anxieux, on ne trouve cependant pas de référence à l’utilisation de l’hypnose dans les TOC, pas plus que dans, par exemple, le « Oxford Handbook of Hypnosis ».
Entretien avec Jean-Marc Benhaiem. Audition de l’Académie nationale de médecine. Lauriane Bordenave : Bonjour Jean-Marc, tu as été auditionné par l’Académie nationale de médecine (ANM) en janvier de cette année au sujet de l’hypnose. Pour quelles raisons ? Jean-Marc Benhaiem : en mars 2013, l’Académie nationale de médecine publie un rapport et des recommandations sur les médecines complémentaires.
Humilité, transmission et partage d’expérience. Petites réflexions à l’intention des futurs congressistes. Le 10 mai 2017 va s’ouvrir en terre volcanique, à Clermont Ferrand, le 10e Forum de la CFHTB : notre terre d’Auvergne et ses volcans montent tranquillement en température... Cette manifestation exceptionnelle, une fois tous les deux ans, va réunir les 35 branches du bel arbre que constitue la Confédération Francophone Hypnose et Thérapies Brèves.
Le mois dernier : Hypnose et anorexie
Hypnose et neurochirurgie
Formation Hypnose et mouvement
Dominique Megglé
L'hypnose, ça marche vraiment ?