Quel est donc ce crabe qui ronge l’estomac sans jamais lâcher prise, qui fait battre le cœur, enflamme la poitrine, serre la gorge, annihile la raison, fait passer du désespoir à l’exaltation et de la vengeance à la construction positive ? Quel est ce sentiment morbide, d’où vient-il ? Est-il une maladie ou une fatalité ? Procède-t-il d’une construction humaine ou provient-il de son animalité ? Le mot jalousie définit-il plusieurs sentiments et comportements ou n’est-il que l’évolution d’un seul ? Amour et jalousie sont-ils toujours mêlés ? Jalousie et infidélité sont-ils toujours liés ? Quand on s’aime devient-on possessif de l’autre ? Etre seul objet d’amour de l’autre, est-ce universel ? Peut-on aimer sans être jaloux ? Peut-on être jaloux sans aimer ? Comment vivre cet enfer qu’est la jalousie ? Qu’en est-il de la clinique ? (12) (13). Tant d’autres questions auxquelles nous allons tenter de répondre.
Introduction
La jalousie est un sentiment conflictuel de méfiance qui donne sans raison objective des aliments à un malaise. Ce sentiment est si commun et si ancien que déjà les dieux de l’Antiquité grecque eux-mêmes y succombaient. Il est vrai que ces dieux étaient particulièrement humains. Héra, la Junon des Romains, femme et aussi sœur de Zeus (alias Jupiter), le faisait surveiller, et il fallait bien ça vu la richesse de sa vie sentimentale, par Argos, l’espion aux cent yeux.
Lucy Vincent (27) pense qu’« il existe toujours chez l’homme un mal-être existentiel lié au fait qu’il ne saura jamais avec certitude s’il est le réel père biologique de ses enfants ». Michel Aubry (1) parle de « leurre » du couple jaloux – jalousé car une partie de la réalité est obstruée par la souffrance, la frustration, la revendication. Patrick Blachère (2) confirme « qu’aucune relation humaine n’est exempte de jalousie ».
En consultation, la jalousie est fréquemment exprimée, cause de désamour, de disputes et de crises, de blocages sexuels, de séparations ou de divorces, de violence conduisant parfois au meurtre.