Une attitude bienveillante permet au thérapeute de rentrer en contact avec toute la complexité de l'histoire du patient. Des études récentes ont mis en évidence le fonctionnement du "mode défaut", expliquant que nous gardons une trace de tout, de l'expérience la plus anodine à la plus délabrante.
L'ensemble de nos traumatismes est ainsi stocké dans des zones profondes du cerveau "inconscient", accessibles cependant en hypnose, ce qui peut permettre d'atteindre les "agrégats" de la mémorisation, et de les nettoyer sans nécessité de faire revivre le traumatisme initial comme en psychothérapie classique. Au patient atteint de douleur chronique nous avons choisi d'expliquer ce mode de fonctionnement. Travailler ainsi avec ces patients nous permet de mesurer l'importance de chaque composante de leur histoire, nous pouvons alors nous les représenter comme un continent fait de plusieurs pays. L'hypnose ainsi que nos connaissances pourront alors nous permettre de venir travailler sur la réfection de tel ou tel pays et lorsque nous avons le sentiment de voyager en terre inconnue nous laissons la pluridisciplinarité prendre tout son sens.
L'intégration de l'hypnose dans l'arsenal thérapeutique a du dépasser des résistances tant de la part des soignants que des patients eux mêmes. La douleur chronique peut être considérée comme une résistance en soi et implique souvent chez les patients des comportements régressifs. C'est à ce titre qu'il nous a semblé pertinent d'intégrer la dynamique des résistances dans l'approche hypnotique. Notre communication se partagera entre nos observations sur le terrain, des exemples cliniques ainsi que plusieurs séquences vidéo (y compris au bloc opératoire) illustrant l’intérêt de l’hypnose dans la prise en charge pluridisciplinaire de la douleur : céphalées et algies faciales, fibromyalgie, douleurs pudendales, neuropathies post-traumatiques, algoneurodystrophie, analgésie peropératoire. Le propos sera aussi de souligner l’importance pour chaque hypnothérapeute d'oser, oser proposer, oser lâcher prise, oser se tromper afin de laisser le patient doser les ingrédients de sa guérison.
Maud Genetier, hypnothérapeute, psychologue en formation. Jean-Pierre Alibeu, anesthésiste-réanimateur, médecin de la douleur, hypnothérapeute, chef du Service de la douleur, CHU de Grenoble.