Madame A., âgée de 56 ans, consulte pour une symptomatologie anxio-dépressive.
On trouve la notion d’alcoolisations massives occasionnelles dans un objectif d’anxiolyse où elle boit seule après le travail.
Elle a été suivie pour des dépressions récurrentes, depuis 1986.
Elle était sous antidépresseurs depuis plusieurs mois et elle n’avait pas noté d’amélioration de sa symptomatologie.
Mme A. est issue d’une fratrie de 9 (2 garçons et 7 filles) ; elle a un demi-frère et une demi-sœur du côté de sa mère. Elle a deux autres demi-frères issus d’une relation incestueuse de son père avec sa demi-sœur.
Elle a quitté la maison parentale à 16 ans avec sa sœur, en fuyant sa famille sans prévenir.
Elle a passé quelques années en Angleterre et a suivi une formation qui lui a permis de trouver le poste qu’elle occupe jusqu’à ce jour.
Elle est divorcée depuis 1986 et a élevé seule sa fille âgée aujourd’hui de 27 ans. Cette dernière s’est mariée il y a un an et est actuellement enceinte.
La patiente n’a pas refait sa vie, vit seule dans son appartement et entretient une relation fusionnelle avec sa fille.
Au cours des premières consultations, la patiente décrit des symptômes dépressifs francs, des ruminations anxieuses générant par moments des idées suicidaires, une symptomatologie post-traumatique assez sévère et des conduites d’évitement : elle n’a pratiquement aucun lien social. Elle parle souvent de l’ambiance incestueuse qui régnait chez elle quand elle était enfant, décrit les images intrusives de son père avec sa demi-sœur : son père partageait le lit avec sa belle-fille, il n’arrêtait pas de menacer ses filles de leur réserver le même sort. Néanmoins, elle dit qu’il ne l’avait jamais touchée. Sa mère aurait été témoin de ces agissements sans jamais réagir. Cette dernière buvait beaucoup et partait, soudain et pendant des semaines, de la maison ; elle revenait à chaque fois enceinte de nouveau.
Au bout de la 4e consultation avec cette patiente, je fis le constat que la symptomatologie ne faisait qu’amplifier malgré la majoration des psychotropes… Devant l’angoisse qui ne cessait de s’intensifier et qui me paralysait également, je décidai de tenter l’hypnose…
Dans l’abord des syndromes psychotraumatiques par l’hypnose, plusieurs techniques hypnotiques peuvent être utilisées.
Pour le syndrome de stress post-traumatique, l’induction lente par fixation d’un point dessiné sur la main peut être proposée. Elle permet au thérapeute de réconforter le patient sur sa capacité à préserver un contrôle sur ce qui se déroule durant l’induction et de le rassurer en insistant sur le fait qu’il reste conscient, qu’il est dans un cabinet de consultation, qu’il continue à percevoir les bruits venant de l’extérieur tout en pouvant se détendre.
On peut suggérer au patient qu’il a un talent pour l’hypnose et pour la dissociation. Il peut utiliser ce talent à son profit. Malgré son anxiété, il peut se détendre et vivre une expérience de relâchement en toute sécurité. La lévitation du bras comme les expériences d’anesthésie ou d’engourdissement d’un doigt ou de la main peuvent être utilisées comme preuves de cette capacité à contrôler une série de sensations qu’il rencontre au travers de son corps.
La base de la technique hypnotique inclut la relaxation, la possibilité d’évoquer un lieu sûr et des suggestions.
Durant la première séance d’hypnothérapie, la recherche de ce lieu sûr et relaxant permet d’ouvrir un espace où le sujet se sent protégé des pensées intrusives dont il souffre. Cette utilisation élémentaire de l’hypnose est très souvent utile pour aider les personnes à se relaxer et à retrouver un sentiment de bien-être.
Dans cette optique, l’hypnose est considérée comme une thérapie plutôt palliative que curative. Elle aide la personne à se sentir mieux et à pouvoir développer ses relations interpersonnelles.
L’hypnose permet aussi au sujet de retrouver un espace psychique ludique dans lequel il peut se mouvoir.
Lorsque l’on veut aider le patient à revivre l’événement traumatique, une technique consiste à suggérer au patient particulièrement anxieux qu’il peut revivre le trauma ou se le remémorer par l’intermédiaire d’un écran de télévision où il revoit le film du traumatisme vécu. On peut même lui suggérer qu’il peut à tout moment stopper ce film en arrêtant l’image vidéo.
La relation thérapeutique joue un rôle essentiel dans ce type de travail. Le patient doit se sentir particulièrement en confiance pour parvenir à surmonter son anxiété. Il doit être convaincu que le thérapeute joue un rôle à la fois protecteur et bienveillant. Le thérapeute ne cherche pas à tout prix à faire revivre le traumatisme. Il aide le patient à pouvoir maîtriser le vécu traumatique d’impuissance, de terreur et d’effroi qui le hante. Cette technique permet de rassurer suffisamment le patient pour qu’il puisse revivre le trauma. Le patient n’est plus seul face à son expérience comme lors du trauma. Il doit pouvoir maîtriser les affects qui y sont liés et retrouver le contrôle de ses émotions, en particulier sur la peur, l’effroi et/ou la colère. Cette possibilité de contrôler à nouveau ses émotions redonne au patient une estime de lui-même qu’il avait perdue. La maîtrise de ses émotions entraîne la réintégration du temps du trauma au temps actuel.