Les fermiers préparent le sol avant de planter les semences. La technique d’Erickson de présager des futurs objectifs a été surnommée ensemencement par Jay Haley. L’ensemencement a été une contribution innovante considérable d’Erickson à la thérapie mais elle reste mal comprise et sous-utilisée.
Tous les grands dramaturges présagent. J’ai lu récemment Haroun et la mer des Histoires de Salman Rushdie. Le livre le plus habile que j’ai jamais lu. Il est centré sur Haroun et son père, qui est conteur. Au début du livre, Haroun demande à son père : « D’où viennent les histoires ? » Son père lui répond qu’elles viennent de la mer des Histoires.
Haroun reproche à son père de ne pas lui en dire assez, et celui-ci continue : « Je bois les eaux, je me sens plein de vapeur, et les histoires apparaissent. » Haroun répond avec mépris : « Mais, Père, si c’est le cas... », auquel son père répond : « Pas de Siage ni de Maisage… » Dans le texte « Si » est écrit avec un I majuscule, et « Mais » avec un M majuscule.
Normalement, « siage » et « maisage » auraient dû être en minuscule. Mais écrits de cette manière, ces mots étaient des semences, car quelques pages plus tard, Haroun rencontre M. Si et M. Mais. Rushdie a subtilement présagé ce qui allait ensuite transpirer.
L’ensemencement a été présenté comme destiné à augmenter l’accessibilité d’un futur objectif. Il existe des centaines d’études en psychologie qui démontrent l’efficacité de l’amorçage, puisque c’est ainsi que les chercheurs ont appelé ce phénomène. Erickson ensemençait toujours les interventions qu’il comptait faire – et ceci n’est pas une exagération. Je me souviens avoir regardé une vidéo des archives de la Fondation Erickson dans laquelle il faisait de l’hypnose avec une femme. Au milieu de la transe, il lui demande ce qui semble être un illogisme : « Si vous étiez assise en face d’une femme blonde, là maintenant, vous n’auriez aucune raison d’être jalouse, n’est-ce pas ? » Déconcertée, elle leva les yeux et répondit : « Non. »
Par la suite, je regardai un autre enregistrement d’Erickson fait une semaine plus tard. Pendant cette séance, Erickson amena une femme blonde, et hypnotisa les deux femmes en même temps. Dans la séance précédente, Erickson avait ensemencé quelque chose qui allait se produire une semaine après.
L’utilisation de l’ensemencement change la mentalité du thérapeute concernant la thérapie. Le thérapeute devient stratégique. Le clinicien aura un but à l’esprit, et travaillera afin d’actualiser ce but. Il portera son attention au processus et au timing de l’intervention. Bien que l’amorçage ait été étudié abondamment, peu de travaux ont été consacrés à l’utilisation de l’ensemencement en thérapie.
Posture G : la personne de bonne humeur
J’utilise le concept de bonne humeur pour indiquer la santé. Une des leçons les plus précieuses que j’ai reçues de Kay Thompson, dentiste qui fit partie de la première génération d’étudiants d’Erickson, fut l’importance de la physiologie. Les praticiens de l’hypnose parlent à la physiologie. En réalisant que la physiologie peut répondre, ils peuvent suggérer : « Votre circulation sanguine peut changer.
Votre verrue peut disparaître. Vos voies aériennes asthmatiques peuvent s’ouvrir. » Malheureusement, parler à la physiologie est devenue un art en déclin ; c’est cependant quelque chose que les cliniciens devraient faire plus souvent.
Posture H : l’humoriste
Bonne humeur a aussi une autre signification : nous pouvons ajouter davantage d’humour à la thérapie. Erickson était assurément un des experts qui ont les premiers défendu l’utilisation de l’humour dans la psychothérapie ; mais lui seul a inventé son usage en hypnose. L’esprit inconscient est réactif à l’humour ; il n’est pas sérieux et terne. Pendant l’hypnose, et même durant son induction, Erickson racontait des blagues. Il attendait qu’une réponse à sa blague survienne chez son patient pendant la transe. La vie peut être sinistre, mais la thérapie ne doit pas l’être. Si les cliniciens prônent la bonne humeur, ils peuvent la confectionner pendant leurs séances.