Résumé :
Les peurs phobiques apparaissent lorsqu’une personne se sent dépassée par trop d’éléments qu’elle ne peut contrôler. Pour illustrer ce propos, nous pouvons prendre l’exemple d’une phobie de l’avion qui se déclenche lorsqu’une personne veut maîtriser tous les éléments simultanément : le bon état de l’avion, les capacités du pilote, les conditions atmosphériques, les risques de collision…
Les douleurs se manifestent lorsqu’un organe échappe à l’harmonie du corps et n’est plus contrôlable. L’organe semble évoluer en dehors du corps sans bénéficier de ses régulations internes.
Dans les deux situations, les personnes souffrent d’une perte de contrôle qui les angoisse et génère un malaise. Les éléments incontrôlés créent une insécurité. L’espace environnant devient hostile, le plaisir est exclu. Le champ est libre pour la peur ou la douleur.
Le comportement d’une personne qui souffre évoque un syndrome obsessionnel. On y retrouve la fixation, la focalisation et la répétition.
Le dictionnaire définit l’obsession dans ces termes : « Etat d’une personne qu’un démon obsède ». Ce libellé laisse entendre une prise de pouvoir par un « démon » sur une personne. Quel est ce démon ? Le dictionnaire dit qu’il peut s’agir d’une représentation. Le démon semble placé à l’extérieur en comparaison avec la possession qui semble agir de l’intérieur.
Le « démon » peut être un produit de l’intérieur, mais qui va se placer à l’extérieur pour tyranniser la personne.
Ce concept est fondamental pour comprendre la maladie. Hegel2 nous le décrit précisément. « …d’une façon générale, l’essence de la maladie doit être placée dans la séparation d’un système particulier de l’organisme d’avec la vie physiologique universelle, et ce système particulier se rend étranger à cette vie universelle, l’organisme animal se présente dans sa finitude sans force et dans la dépendance d’un pouvoir étranger… ». Un système particulier s’est désolidarisé de l’ensemble composant un être vivant. En se plaçant à l’extérieur, ce système met l’être sous sa dépendance. Ce système devient étranger au corps, il devient le démon qui le malmène.
Quel est ou quels sont ces systèmes particuliers ?
Ces « systèmes particuliers » dont parle Hegel, sont pour les patients, l’objet de leurs plaintes. Ce sont leurs motifs de consultation. Ce sont ceux que les malades montrent du doigt.
Les migraineux montrent leur tête, les colopathes montrent leur côlon, les phobiques montrent leur peur de quelque chose, les douloureux montrent un organe, leur dos, leurs vertèbres,… les insomniaques désignent la fonction sommeil etc…
Ces organes ou ces fonctions endommagés prennent le contrôle de la personne et même parfois la définissent. Il ne s’agit plus de la personne untel ou unetelle, mais de la migraineuse, ou de l’amputée de la chambre 13, ou de la hernie discale de Rouen ou de Poitiers. Les patients comme leurs thérapeutes sont plus ou moins soumis à ce « système particulier » qui a pris en main la vie du patient et décide tyranniquement des orientations à prendre, les poussant vers les médicaments ou vers la chirurgie.
Les peurs phobiques apparaissent lorsqu’une personne se sent dépassée par trop d’éléments qu’elle ne peut contrôler. Pour illustrer ce propos, nous pouvons prendre l’exemple d’une phobie de l’avion qui se déclenche lorsqu’une personne veut maîtriser tous les éléments simultanément : le bon état de l’avion, les capacités du pilote, les conditions atmosphériques, les risques de collision…
Les douleurs se manifestent lorsqu’un organe échappe à l’harmonie du corps et n’est plus contrôlable. L’organe semble évoluer en dehors du corps sans bénéficier de ses régulations internes.
Dans les deux situations, les personnes souffrent d’une perte de contrôle qui les angoisse et génère un malaise. Les éléments incontrôlés créent une insécurité. L’espace environnant devient hostile, le plaisir est exclu. Le champ est libre pour la peur ou la douleur.
Le comportement d’une personne qui souffre évoque un syndrome obsessionnel. On y retrouve la fixation, la focalisation et la répétition.
Le dictionnaire définit l’obsession dans ces termes : « Etat d’une personne qu’un démon obsède ». Ce libellé laisse entendre une prise de pouvoir par un « démon » sur une personne. Quel est ce démon ? Le dictionnaire dit qu’il peut s’agir d’une représentation. Le démon semble placé à l’extérieur en comparaison avec la possession qui semble agir de l’intérieur.
Le « démon » peut être un produit de l’intérieur, mais qui va se placer à l’extérieur pour tyranniser la personne.
Ce concept est fondamental pour comprendre la maladie. Hegel2 nous le décrit précisément. « …d’une façon générale, l’essence de la maladie doit être placée dans la séparation d’un système particulier de l’organisme d’avec la vie physiologique universelle, et ce système particulier se rend étranger à cette vie universelle, l’organisme animal se présente dans sa finitude sans force et dans la dépendance d’un pouvoir étranger… ». Un système particulier s’est désolidarisé de l’ensemble composant un être vivant. En se plaçant à l’extérieur, ce système met l’être sous sa dépendance. Ce système devient étranger au corps, il devient le démon qui le malmène.
Quel est ou quels sont ces systèmes particuliers ?
Ces « systèmes particuliers » dont parle Hegel, sont pour les patients, l’objet de leurs plaintes. Ce sont leurs motifs de consultation. Ce sont ceux que les malades montrent du doigt.
Les migraineux montrent leur tête, les colopathes montrent leur côlon, les phobiques montrent leur peur de quelque chose, les douloureux montrent un organe, leur dos, leurs vertèbres,… les insomniaques désignent la fonction sommeil etc…
Ces organes ou ces fonctions endommagés prennent le contrôle de la personne et même parfois la définissent. Il ne s’agit plus de la personne untel ou unetelle, mais de la migraineuse, ou de l’amputée de la chambre 13, ou de la hernie discale de Rouen ou de Poitiers. Les patients comme leurs thérapeutes sont plus ou moins soumis à ce « système particulier » qui a pris en main la vie du patient et décide tyranniquement des orientations à prendre, les poussant vers les médicaments ou vers la chirurgie.
Quel est cet extérieur ? Où se place le système qui s’est détaché ?
Mesmer dit en parlant de cet espace, qu’il est « un fluide universel dans lequel tous les corps sont plongés ». Une sorte d’« éther » qui assure la continuité, le lien entre les êtres animés et non animés. Le système particulier s’est désolidarisé du corps et est venu s’interposer entre l’être et son monde. Il empêche toute relation directe entre eux. Quand les patients regardent autour d’eux, ils ne voient que ce qui s’est séparé d’eux. Il semble qu’en se plaçant à l’extérieur, les « systèmes » se soient comme dilatés. Ils obscurcissent la vue des malades ou disposent d’un fort pouvoir d’attraction qui focalise l’attention de ceux-ci. Mesmer dirait que la polarité s’est déplacée. Le fluide magnétique s’est concentré sur cet élément extérieur, déséquilibrant les forces en jeu. Il faudrait un baquet, une force magnétique intense pour renverser les polarités et harmoniser la répartition de l’électricité dans le corps et autour de lui.
L’organisation de l’espace de la personne a été modifiée.
La perte de contrôle
Ce que Hegel écrit à ce sujet est clair. Ce qui s’est détaché de la vie universelle, n’y participe plus. Le « système » évolue pour son propre compte. Il n’est plus contrôlé et équilibré par le corps. Il lui est devenu étranger. À ce titre, il n’est plus reconnu par le corps qui songe à s’en débarrasser. Plus il reste longtemps extérieur au corps, plus il le tyrannise. Il ne peut plus disposer des fonctions régulatrices du corps. Mis à distance, son état s’altère ; il inquiète le corps qui ne voit guère comment le réintégrer dans un tel état. Le corps finit par ne plus le supporter et cherche l’évitement. Le patient est terrorisé par la fonction ou l’organe défectueux et cherche un moyen pour régler le problème énergiquement. Si c’est un organe, il songe à la chirurgie ; ce qui est logique puisque l’organe s’est placé lui-même à l’extérieur de l’espace de vie de la personne et ne semble pas vouloir y revenir de lui-même. Si c’est une fonction, le projet serait de la bâillonner ou de la substituer par des médicaments.
Cette perte de lucidité est un véritable « accès de folie » de la personne qui est prête à des solutions radicales pour en finir avec son tyran. Elle peut décider de se venger en maltraitant à son tour la partie malade qui s’est exclue. Elle se livre alors au corps médical qui pique, infiltre, injecte, explore et prélève. La personne peut décider l’ablation d’une partie d’elle-même en se livrant au chirurgien qui répond à la détresse de son patient. La démarche semble logique. Ne plus voir, ne plus entendre parler de ce qui fait souffrir ; couper les ponts et les liens d’avec le tortionnaire. L’exérèse d’une partie de soi, gravement blessée, est justifiée, mais l’ablation d’une partie restée à peu près saine est contraire au processus de guérison qui réclame une réconciliation et non une expulsion.
Ce comportement est phobique. Il touche aussi bien un organe du corps, une fonction de la vie végétative ou un élément de son environnement direct. Il se manifeste par une fuite, un évitement, des pensées obsessionnelles et des peurs paniques incontrôlables.
Il est facile d’admettre qu’une personne soit inquiète d’une partie de son corps. Mais qu’en est-il de la peur de l’avion ? de la peur des serpents ? ou de la peur du vide ? Ces éléments semblent extérieurs à la personne. Il ne semble pas à première vue qu’il y ait une similitude entre ces deux situations.
Une réponse nous est fournie par l’étude des peuples primitifs. Lucien Lévy-Bruhl3 décrit ce qu’il appelle « l’extension de la personnalité ». Chez de nombreuses tribus d’Afrique ou d’Amérique du Sud, les objets du quotidien, les objets fabriqués font partie intégrante de la personnalité. Cette confusion est valable aussi pour les traces de pas, les plantes que l’on a cultivées, et tout ce qui a été en contact avec la personne : les vêtements, les bijoux. Il n’existe pas non plus d’individualité : l’individu est fondu dans son groupe auquel il est assimilé. Pour de nombreuses tribus primitives, la perception ne fait pas de franche distinction entre un humain, un animal, un végétal ou un minéral (rocher). « État émotionnel étrange pour nous, qui ne pouvons guère y entrer, mais naturel pour le « primitif »4, à cause de l’essence commune qu’il se représente, ou plutôt qu’il sent dans tous les êtres avec qui il se trouve en relation. » Pour curieuse qu’elle nous paraisse, cette disposition semble correspondre à la sensorialité première dont parle François Roustang. Une sensorialité basée sur l’indéterminé, avant les cloisonnements rendus nécessaires par la raison et par la culture ambiante.
Cet éclairage donné par l’étude anthropologique des peuples primitifs, nous fait entrevoir d’une autre façon, la construction d’un comportement phobique.
L’équilibre semble réalisé entre les nombreux composants « d’essence commune ». L’équilibre est rompu si un élément devient « étranger » et ne participe plus à « la vie universelle ». La personne ne voit plus cet élément comme étant d’essence commune. Alors le malaise s’installe.
Mesmer dit en parlant de cet espace, qu’il est « un fluide universel dans lequel tous les corps sont plongés ». Une sorte d’« éther » qui assure la continuité, le lien entre les êtres animés et non animés. Le système particulier s’est désolidarisé du corps et est venu s’interposer entre l’être et son monde. Il empêche toute relation directe entre eux. Quand les patients regardent autour d’eux, ils ne voient que ce qui s’est séparé d’eux. Il semble qu’en se plaçant à l’extérieur, les « systèmes » se soient comme dilatés. Ils obscurcissent la vue des malades ou disposent d’un fort pouvoir d’attraction qui focalise l’attention de ceux-ci. Mesmer dirait que la polarité s’est déplacée. Le fluide magnétique s’est concentré sur cet élément extérieur, déséquilibrant les forces en jeu. Il faudrait un baquet, une force magnétique intense pour renverser les polarités et harmoniser la répartition de l’électricité dans le corps et autour de lui.
L’organisation de l’espace de la personne a été modifiée.
La perte de contrôle
Ce que Hegel écrit à ce sujet est clair. Ce qui s’est détaché de la vie universelle, n’y participe plus. Le « système » évolue pour son propre compte. Il n’est plus contrôlé et équilibré par le corps. Il lui est devenu étranger. À ce titre, il n’est plus reconnu par le corps qui songe à s’en débarrasser. Plus il reste longtemps extérieur au corps, plus il le tyrannise. Il ne peut plus disposer des fonctions régulatrices du corps. Mis à distance, son état s’altère ; il inquiète le corps qui ne voit guère comment le réintégrer dans un tel état. Le corps finit par ne plus le supporter et cherche l’évitement. Le patient est terrorisé par la fonction ou l’organe défectueux et cherche un moyen pour régler le problème énergiquement. Si c’est un organe, il songe à la chirurgie ; ce qui est logique puisque l’organe s’est placé lui-même à l’extérieur de l’espace de vie de la personne et ne semble pas vouloir y revenir de lui-même. Si c’est une fonction, le projet serait de la bâillonner ou de la substituer par des médicaments.
Cette perte de lucidité est un véritable « accès de folie » de la personne qui est prête à des solutions radicales pour en finir avec son tyran. Elle peut décider de se venger en maltraitant à son tour la partie malade qui s’est exclue. Elle se livre alors au corps médical qui pique, infiltre, injecte, explore et prélève. La personne peut décider l’ablation d’une partie d’elle-même en se livrant au chirurgien qui répond à la détresse de son patient. La démarche semble logique. Ne plus voir, ne plus entendre parler de ce qui fait souffrir ; couper les ponts et les liens d’avec le tortionnaire. L’exérèse d’une partie de soi, gravement blessée, est justifiée, mais l’ablation d’une partie restée à peu près saine est contraire au processus de guérison qui réclame une réconciliation et non une expulsion.
Ce comportement est phobique. Il touche aussi bien un organe du corps, une fonction de la vie végétative ou un élément de son environnement direct. Il se manifeste par une fuite, un évitement, des pensées obsessionnelles et des peurs paniques incontrôlables.
Il est facile d’admettre qu’une personne soit inquiète d’une partie de son corps. Mais qu’en est-il de la peur de l’avion ? de la peur des serpents ? ou de la peur du vide ? Ces éléments semblent extérieurs à la personne. Il ne semble pas à première vue qu’il y ait une similitude entre ces deux situations.
Une réponse nous est fournie par l’étude des peuples primitifs. Lucien Lévy-Bruhl3 décrit ce qu’il appelle « l’extension de la personnalité ». Chez de nombreuses tribus d’Afrique ou d’Amérique du Sud, les objets du quotidien, les objets fabriqués font partie intégrante de la personnalité. Cette confusion est valable aussi pour les traces de pas, les plantes que l’on a cultivées, et tout ce qui a été en contact avec la personne : les vêtements, les bijoux. Il n’existe pas non plus d’individualité : l’individu est fondu dans son groupe auquel il est assimilé. Pour de nombreuses tribus primitives, la perception ne fait pas de franche distinction entre un humain, un animal, un végétal ou un minéral (rocher). « État émotionnel étrange pour nous, qui ne pouvons guère y entrer, mais naturel pour le « primitif »4, à cause de l’essence commune qu’il se représente, ou plutôt qu’il sent dans tous les êtres avec qui il se trouve en relation. » Pour curieuse qu’elle nous paraisse, cette disposition semble correspondre à la sensorialité première dont parle François Roustang. Une sensorialité basée sur l’indéterminé, avant les cloisonnements rendus nécessaires par la raison et par la culture ambiante.
Cet éclairage donné par l’étude anthropologique des peuples primitifs, nous fait entrevoir d’une autre façon, la construction d’un comportement phobique.
L’équilibre semble réalisé entre les nombreux composants « d’essence commune ». L’équilibre est rompu si un élément devient « étranger » et ne participe plus à « la vie universelle ». La personne ne voit plus cet élément comme étant d’essence commune. Alors le malaise s’installe.
Quels sont les éléments en cause ?
Après avoir passé en revue une série d’éléments intérieurs, nous pouvons ajouter des éléments extérieurs qui participent au même titre à l’équilibre d’une personne en liens avec un espace qui va bien au-delà du corps anatomique.
Au passage, nous pouvons trouver une similitude de processus dans les relations humaines au sein d’une famille ou d’un groupe social lorsqu’un individu ou un enfant a un comportement qui est vécu comme étrange ou étranger. Il court le risque d’être malmené ou expulsé du groupe.
La perte du contrôle se manifeste sur un élément qui n’apparaît plus comme familier, rassurant. Cet élément ou ce système a perdu sa nature apaisante en se plaçant face à une personne qui le ressent comme hostile.
La pathologie se déclare et se complique lorsqu’une personne se laisse tenter par cette nouvelle organisation. Un élément s’est interposé entre la personne et son monde. Il n’y a plus de rapport direct, la relation est médiée et doit passer par ce poste de contrôle qui prend en main la vie et la destinée d’une personne qui perd ainsi sa liberté. Cette situation est courante et banale pour les cliniciens qui sont habitués à ce spectacle de patients qui ne vivent qu’au travers d’un organe ou d’un souvenir traumatique. C’est leur unique sujet de conversation, tout ce qui leur arrive est en relation avec le problème. Ils ne se définissent que par rapport à un élément devenu toxique. Ce phénomène peut se produire en dehors de la maladie. Il est possible d’agir de même en interposant le travail ou la famille ou son ambition ou sa soif d’argent et de réussite, entre la vie et soi, rendant impossible ou improbable une relation simple et directe avec le monde vivant. Le contact immédiat avec la vie est si difficile qu’il devient tentant de s’enivrer de drogues ou d’actions ou de maladie ou de peurs, pour fuir un face à face oppressant avec sa propre vie.
Comment guérir ?
Est-ce que d’avoir exposé quelques hypothèses d’installation de la phobie, de la douleur et de la maladie en général, peut aider à guérir nos patients ?
D’après ces hypothèses, pour guérir de ces pathologies, il faudrait aller se saisir des « systèmes » qui s’étaient détachés et « rendus étrangers » et les réincorporer. Comment procéder pour nous les rendre familiers et silencieux ? Roustang dirait : « En le faisant tout simplement ! ».
Les exercices pour guérir sont dictés par les dires du patient. Ils sont aussi nombreux et imprévisibles qu’il y a de situations et de vécus différents. Nous ne pouvons et nous ne devons donner ici une méthode ou une technique particulière. Toutefois, la physiopathologie de la maladie nous a appris que les patients étant naturellement tentés d’entrer en conflit avec l’organe ou la fonction détachée, l’objectif du thérapeute sera inverse : provoquer un revirement d’attitude et amener l’idée de la réconciliation et de la mise en mouvement.
La maladie se traduisait par une rupture puis par un isolement et enfin une immobilisation d’un système. La tâche du thérapeute sera d’amener son patient à produire l’inverse : c’est-à-dire à rétablir des liens, un retour vers la totalité au sein du mouvement de « la vie physiologique universelle ».
Le soin se construit sur les déclarations du patient. Par exemple, s’il dit qu’il déteste tel organe de son corps, alors le thérapeute peut lui demander de l’accepter tel qu’il est, même dans l’état détérioré actuel.
Autre exemple, si son patient est fâché contre son entourage qui lui mène la vie dure, il peut lui demander de faire la paix avec l’entourage en imaginant sa présence dans la pièce.
Autre exemple, si le patient a peur d’un accident d’avion, il peut lui demander de visualiser un accident et d’accepter sans émotion cette éventualité.
Ces exemples sont des caricatures sans vie, sans consistance, très éloignées de l’intensité et de la densité du soin. Ce sont de pâles reconstitutions qui décrivent un peu, ce qui se passe dans l’accompagnement thérapeutique.
Les hypothèses d’installation de ces pathologies peuvent changer radicalement la démarche thérapeutique. La mise à l’écart d’un système évoque la « dissociation » bien connue des hypnothérapeutes. Quelques études récentes6 confirment ce que l’hypnose nous avait appris.
Lorsqu’un membre a été blessé puis réparé, sa mise à l’écart provisoire a modifié l’équilibre et sa représentation. C’est le travail du médecin de rééducation ou du kinésithérapeute de remettre ce membre en mouvement et en liens avec le corps. L’hypnothérapeute peut calquer son attitude sur la réadaptation fonctionnelle. Il a la tâche d’aider son patient à se réapproprier les organes ou les fonctions qui avaient été mises à l’écart.
Un patient me dit au cours d’une séance : « Finalement, je crois comprendre que je dois accepter la réalité telle qu’elle est ? ». Lorsque ce travail sera effectué, la peur de ce qui est étrange et étranger disparaît aussitôt. Le conflit disparaît entre l’être et une partie de ce qui le constitue ; les mécanismes antalgiques et anxiolytiques peuvent agir dans ce nouveau climat. Ce qui paraissait hostile est de nouveau apprivoisé.
Après avoir passé en revue une série d’éléments intérieurs, nous pouvons ajouter des éléments extérieurs qui participent au même titre à l’équilibre d’une personne en liens avec un espace qui va bien au-delà du corps anatomique.
Au passage, nous pouvons trouver une similitude de processus dans les relations humaines au sein d’une famille ou d’un groupe social lorsqu’un individu ou un enfant a un comportement qui est vécu comme étrange ou étranger. Il court le risque d’être malmené ou expulsé du groupe.
La perte du contrôle se manifeste sur un élément qui n’apparaît plus comme familier, rassurant. Cet élément ou ce système a perdu sa nature apaisante en se plaçant face à une personne qui le ressent comme hostile.
La pathologie se déclare et se complique lorsqu’une personne se laisse tenter par cette nouvelle organisation. Un élément s’est interposé entre la personne et son monde. Il n’y a plus de rapport direct, la relation est médiée et doit passer par ce poste de contrôle qui prend en main la vie et la destinée d’une personne qui perd ainsi sa liberté. Cette situation est courante et banale pour les cliniciens qui sont habitués à ce spectacle de patients qui ne vivent qu’au travers d’un organe ou d’un souvenir traumatique. C’est leur unique sujet de conversation, tout ce qui leur arrive est en relation avec le problème. Ils ne se définissent que par rapport à un élément devenu toxique. Ce phénomène peut se produire en dehors de la maladie. Il est possible d’agir de même en interposant le travail ou la famille ou son ambition ou sa soif d’argent et de réussite, entre la vie et soi, rendant impossible ou improbable une relation simple et directe avec le monde vivant. Le contact immédiat avec la vie est si difficile qu’il devient tentant de s’enivrer de drogues ou d’actions ou de maladie ou de peurs, pour fuir un face à face oppressant avec sa propre vie.
Comment guérir ?
Est-ce que d’avoir exposé quelques hypothèses d’installation de la phobie, de la douleur et de la maladie en général, peut aider à guérir nos patients ?
D’après ces hypothèses, pour guérir de ces pathologies, il faudrait aller se saisir des « systèmes » qui s’étaient détachés et « rendus étrangers » et les réincorporer. Comment procéder pour nous les rendre familiers et silencieux ? Roustang dirait : « En le faisant tout simplement ! ».
Les exercices pour guérir sont dictés par les dires du patient. Ils sont aussi nombreux et imprévisibles qu’il y a de situations et de vécus différents. Nous ne pouvons et nous ne devons donner ici une méthode ou une technique particulière. Toutefois, la physiopathologie de la maladie nous a appris que les patients étant naturellement tentés d’entrer en conflit avec l’organe ou la fonction détachée, l’objectif du thérapeute sera inverse : provoquer un revirement d’attitude et amener l’idée de la réconciliation et de la mise en mouvement.
La maladie se traduisait par une rupture puis par un isolement et enfin une immobilisation d’un système. La tâche du thérapeute sera d’amener son patient à produire l’inverse : c’est-à-dire à rétablir des liens, un retour vers la totalité au sein du mouvement de « la vie physiologique universelle ».
Le soin se construit sur les déclarations du patient. Par exemple, s’il dit qu’il déteste tel organe de son corps, alors le thérapeute peut lui demander de l’accepter tel qu’il est, même dans l’état détérioré actuel.
Autre exemple, si son patient est fâché contre son entourage qui lui mène la vie dure, il peut lui demander de faire la paix avec l’entourage en imaginant sa présence dans la pièce.
Autre exemple, si le patient a peur d’un accident d’avion, il peut lui demander de visualiser un accident et d’accepter sans émotion cette éventualité.
Ces exemples sont des caricatures sans vie, sans consistance, très éloignées de l’intensité et de la densité du soin. Ce sont de pâles reconstitutions qui décrivent un peu, ce qui se passe dans l’accompagnement thérapeutique.
Les hypothèses d’installation de ces pathologies peuvent changer radicalement la démarche thérapeutique. La mise à l’écart d’un système évoque la « dissociation » bien connue des hypnothérapeutes. Quelques études récentes6 confirment ce que l’hypnose nous avait appris.
Lorsqu’un membre a été blessé puis réparé, sa mise à l’écart provisoire a modifié l’équilibre et sa représentation. C’est le travail du médecin de rééducation ou du kinésithérapeute de remettre ce membre en mouvement et en liens avec le corps. L’hypnothérapeute peut calquer son attitude sur la réadaptation fonctionnelle. Il a la tâche d’aider son patient à se réapproprier les organes ou les fonctions qui avaient été mises à l’écart.
Un patient me dit au cours d’une séance : « Finalement, je crois comprendre que je dois accepter la réalité telle qu’elle est ? ». Lorsque ce travail sera effectué, la peur de ce qui est étrange et étranger disparaît aussitôt. Le conflit disparaît entre l’être et une partie de ce qui le constitue ; les mécanismes antalgiques et anxiolytiques peuvent agir dans ce nouveau climat. Ce qui paraissait hostile est de nouveau apprivoisé.