Interactions Thérapeutiques, éclairages développementaux. Revue Hypnose Thérapies Brèves 29



I. CAPPONI ; A. RAMBAUD ; J.P. COURTIAL

Dans la continuité de la réflexion systémique, la compréhension de ce qui se passe en hypnose et lors de certaines approches psychothérapiques peut s’enrichir de nombreux travaux en psychologie de l’enfant. Des recherches qui le plus souvent préexistaient à celles du groupe de Palo Alto.

L’hypnose met en jeu des interactions entre thérapeutes et patients qui vont bien au-delà de la notion psychanalytique de transfert. Il en va de même pour les thérapies dites énergétiques que nous désignerons dans la suite du texte par thérapies interactionnistes. L’hypnose et les thérapies dites énergétiques mettent en jeu des objets médiateurs, concrets ou abstraits (pendule, fétiche, aiguilles, prière, etc.), que nous appellerons, à la suite de la sociologie de la traduction, acteurs réseaux, dans la mesure où ils interviennent à partir de ce à quoi ils sont associés.

Ces interactions nous semblent remettre en cause les approches classiques en développement de l’enfant comme celles de Freud et de Piaget centrées sur le sujet et non sur les interactions sociales comme premières dans la construction de soi. D’autres approches du développement de l’enfant partent d’abord des interactions sociales. Nous pensons à celle de Vygotsky travaillant sur le développement intellectuel, et de Winnicott, Bowlby, Serge Lebovici, Daniel Stern, travaillant sur les interactions propres à la petite enfance. A la fois ces approches légitiment l’approche thérapeutique interactionniste et cette dernière les légitime en retour.

LE SOCIO-CONSTRUCTIVISME

Vygotsky (1896-1934) est un psychologue de l’ex-URSS, contemporain de Piaget. S’inscrivant dans ce que la philosophie marxiste pouvait avoir de plus fécond, il a privilégié le rôle de la société dans le développement de l’enfant. Il a développé une approche dite socio-constructiviste concernant l’apprentissage. Il peut être considéré comme le partenaire intellectuel russe de Piaget. Selon Vygotsky, l’évolution et la construction des connaissances chez l’enfant puis l’adulte sont tributaires : des formes culturelles et de leur transmission sociale. Autrement dit, les fonctions psychiques supérieures propres à l’espèce humaine sont issues de l’activité propre de la communauté considérée et se développent chez l’enfant dans un con texte d’interaction sociale. La relation est première dans la construction du soi.


Un premier parallèle avec les thérapies interactionnistes peut être établi : les thérapies interactionnistes mettent en jeu des médiateurs (pendule, fétiche, aiguilles, prière etc.) qui sont autant d’acteurs réseaux dépendant des formes culturelles établies et de leur transmission sociale, ou peut-être plus précisément pour nous, de leur popularité, en termes de ce qui est admis par un groupe ou sous-groupe culturel (prière, aiguilles, médicaments…).

La médiation par l’outil a au moins une incidence sur l’activité elle-même par sa fonction de représentation ou de signification : « Les activités ne sont plus seulement présentes dans leur seule exécution. Elles existent (en quelque sorte) indépendamment d’elle dans les outils qui les représentent et par là-même les signifient ». Dans cette conception, les outils sociaux, culturels occupent une place fondamentale en tant que médiateurs de l’activité. Ces objets permettent l’instauration de ce qu’on nomme un échange triadique, à savoir le phénomène d’attention conjointe ou quand le nourrisson et l’adulte font attention simultanément au même objet.

Cette communication est d’ailleurs un précurseur du langage, lui-même renvoyant à la forme au sens de forme du rythme (voir plus loin). L’objet culturel est alors un acteur réseau participant à l’émergence de nos identités. L’esprit humain organise son rapport au monde via, entre autres objets, les signes linguistiques, lesquels jouent un rôle dans la mise en forme de l’expérience.

DE L’INTERPERSONNEL À L’INTRAPERSONNEL


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IRENE CAPPONI Maître de Conférences à la Faculté de Psychologie de l’université de Nantes. Spécialisée en psychologie du développement (doctorat), ses recherches portent actuellement sur la parentalité en périnatalité. Formée en thérapie psychocorporelle et en thérapies basées sur la pleine conscience ; formation de psychologue clinicienne en cours

ANGELIQUE RAMBAUD
Psychologue et docteur en psychologie, diplômée de l’Université de Nantes. Spécialisée dans le domaine de la psychologie du développement. Exerce en cabinet libéral à Nantes, auprès d’adultes et d’enfants, et participe aux activités de recherches du Laboratoire de Psychologie.

JEAN-PIERRE COURTIAL Ingénieur de l'Ecole Centrale des Arts et Manufactures, licencié en sociologie et titulaire d’une thèse de 3è cycle en psychologie sociale. A été chercheur au Centre de Sociologie de l'Ècole des Mines de Paris de 1976 à 1990 dans le domaine de la sociologie des sciences et de la scientométrie, puis Professeur à la Faculté de Psychologie de l'Université de Nantes et chercheur au Laboratoire de Psychologie jusqu'à sa retraite en 2007. Anime un groupe de recherche en psychologie transdisciplinaire réunissant des praticiens et des universitaires, y compris dans le domaine de la physique.


Pour un changement de type 3.
Stéphanie GUILLOU et Dr Franck GARDEN-BRÈCHE
Rencontre de troisième type avec une infirmière en hématooncologie et un algologue urgentiste qui proposent, à partir d’une pratique laissant l’esprit rationnel de côté, une conception nouvelle du changement thérapeutique se situant dans la continuité des travaux de Gregory Bateson menés avec Paul Waztlawick, et basée sur un accueil total de l’émotion naissant de la rencontre.

AMUSANT N'EST-CE PAS ? Dr Thierry SERVILLAT

Une des attitudes fondamentales –peut-être la principale- qu’avait Milton Erickson envers la vie était d’essayer de s’amuser (to have some fun) 1. Y compris dans son travail.

Un thérapeute qui veut s’amuser ? Paradoxe, dirons-nous très vite ! Aider, soigner l’autre est théoriquement un métier… sérieux, ne pensez-vous pas 2 ?

Comment concevoir cela ? La thérapie aurait-elle à voir avec les Muses et la musique ? Oui sûrement, mais le mot « amuser » ne semble, contrairement aux apparences, avoir aucun rapport avec celles-ci.

QUITTER LA CONTRAINTE POUR RETROUVER SES OBLIGATIONS ! Cynthia DRICI

Certaines demandes de thérapies résultent assez fréquemment d’un sentiment de contrainte qui empêche de vivre. Dans une perspective phénoménologique, l’hypnose est là, disponible, pour aider au dégagement qui permettra au patient de pouvoir de nouveau accéder à ses valeurs. Exploration d’un paradoxe qui n’est qu’apparent. Lorsqu’un individu décide de consulter un spécialiste de l’accompagnement thérapeutique, il décrit bien souvent, lors la première rencontre, une situation dans laquelle il se sent bloqué, figé.

POUR JOUER AVEC LES LIMITES INVERSER LE SENS.J. de MARTINO

Variation sur le « Non !... J’déconne… » utilisé par de nombreux adolescents, le texte de l’intervention de Joël de Martino très remarquée lors des Transversales de Vaison la Romaine en 2008 est publiée en hommage à Franck Farrelly. DÉFINITIONS Déconner (v. intr.) : dire des bêtises, des inepties, ne pas être sérieux (argot) ; exagérer, divaguer, déraisonner ; plaisanter, s’amuser, faire des bêtises, se laisser aller.

EN VIE JUSQU’À LA FIN, ACCOMPAGNER L’HUMAIN
Véronique LESAGE, psychologue, pratique une hypnose issue des thérapies humanistes.


Elle nous raconte le chemin fait avec Catherine, malade d’un cancer colique. Un accompagnement utilisant l’hypnose afin de répondre au mieux à l’objectif demandé par la patiente : préserver son humanité. La pratique de l’hypnothérapie s’inscrit dans un relationnel, un accompagnement singulier entre un professionnel et son patient.

INTERACTIONS THÉRAPEUTIQUES ÉCLAIRAGES DÉVELOPPEMENTAUX
I. CAPPONI ; A. RAMBAUD ; J.P. COURTIAL


Dans la continuité de la réflexion systémique, la compréhension de ce qui se passe en hypnose et lors de certaines approches psychothérapiques peut s’enrichir de nombreux travaux en psychologie de l’enfant. Des recherches qui le plus souvent préexistaient à celles du groupe de Palo Alto.

Robert Montaudouin par Bernadette Audrain-Servillat

Originaire de Chartres, Robert Montaudouin a dessiné très tôt. Dans les années 70, poussé par un prof d’anglais il a durant quatre années étudié à l’Ecole des Arts Appliqués et des Métiers d’Art de Paris où il obtient un diplôme en art mural. Il continue son cursus à l’Ecole des Beaux Arts de Paris (atelier de peinture de Gustave Singier)

Procrastination(s). Dr Thierry SERVILLAT

Professeur de philosophie à Stanford, John Perry, procrastinateur lui-même (si nous le croyons) a écrit, sur un mode humoristique, un manuel qui pourra aider bon nombre de nos patients, et aussi pas mal de thérapeutes. Sur un problème souvent qualifié de « stupide », car semblant tout à fait irrationnel (nous dirons acrasique1 pour faire « branché philo grecque »), l’auteur va écrire un livre brillant, grand succès de librairie témoignant, si besoin était, de la difficulté de nos contemporains à gérer leur temps.

QUIPROQUO, MALENTENDU ET INCOMMUNICABILITÉ
« Trop bien ! » Dr Stefano COLOMBO


Deux mots qui sont déjà trop pour moi. J’avais déjà de la peine avec le bien et le mal, mais là ç’en est trop. Regardons de plus près et commençons par la deuxième partie, le bien. Je peux dire que j’ai du mal avec le bien alors que la langue française a du mal à me laisser dire que j’ai du bien avec le mal.

CONGRÈS ET CONFÉRENCES. Tentatives, solutions, logiques. Christine GUILLOUX

Compte rendu de Christine GUILLOUX Hors contexte, les mots et les gestes n’ont pas de signification. Gregory BATESON Ordonner le monde ou le désordonner ? Décrire les parties jusqu’à l’infiniment petit ou comprendre les relations, les interactions des parties entre elles, avec les autres, le monde, l’univers ?

Pour une psycho-allergologie. Dr Christian MARTENS

Les médecins s’appuient sur les sciences physiques et biologiques pour expliquer les symptômes. Elles nous permettent d’en déterminer les causes et les conséquences, d’ex-pliquer, c’est-à-dire littéralement de dé-plier les signes dans une série de cause à effet. Mais par souci d’objectivité, celles-ci se refusent à s’interroger sur leur sens, sur les questions relatives au sens de ces signes, à les comprendre. Car comprendre, c’est de l’intérieur, découvrir le sens.

Rédigé le 13/06/2013 modifié le 03/10/2013
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Dr Thierry SERVILLAT, Psychiatre, Ancien Président de la Confédération Francophone d'Hypnose et… En savoir plus sur cet auteur


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