Introduction
Je ne vais pas vous faire un cours sur l’hypnose, encore moins une formation sur ces techniques. Je vais plutôt tenter de vous exposer comment ces techniques fonctionnent et comment elles peuvent avoir un impact non seulement sur l’éprouvé douloureux, mais aussi sur le fonctionnement corporel.
Tout d’abord, une maladie, quelle qu’elle soit ne correspond pas dans sa réalité à une logique linéaire telle qu’une cause entraine un effet. Par exemple, quelque chose d’aussi simple qu’une blessure liée à un accident de la route verra son devenir pouvoir être profondément modifié selon que le blessé se sent une victime en droit de crier justice ou bien s’il est responsable. Selon le cas, les processus neuro humoraux immunitaires mis en jeu dans la guérison se trouveront profondément différents.
Quelques grands principes des Thérapie à entrée Psy
La maladie est systémique : toutes nos représentations linéaires sont fausses. Tout implique tout et réciproquement. De ce fait, même si quelquefois une logique linéaire permet de trouver des solutions, bien souvent, l’expérience montre qu’une intervention non logique porte des fruits. Comment expliquer sinon l’efficacité des cures thermales ou quelquefois d’une bonne intervention roborative ; l’effet quelquefois sidérant d’un deuil, l’existence maintenant indubitable de la réalité organique de l’effet placebo ?
Chaque logique thérapeutique a une voie d’entrée privilégiée dans le système déréglé qui produit une pathologie : Psy pour moi, corporel pour l’allopathie, etc.
Souvent, l’entrée se fera par l’abord de la plainte, et c’est souvent le cas en matière de douleur lorsque la construction pathologique est confuse ou échappe à une logique simple.
La plainte est systémique : ce n’est qu’un élément apparent d’un ensemble beaucoup plus complexe.
Elle est prise dans le réseau de croyances de la personne, c.-à-d. au sens que la personne lui donne.
Elle est liée à l'émotion et par là même à tout un système neuro humoral.
Le système nerveux est un organe de représentation: le réel nous est à tout jamais interdit ; le travail de type psy repose donc uniquement sur des représentations, ce qui pourrait au premier abord pouvoir le disqualifier puisque, d’une certaine façon, ce serait lâcher la proie pour l’ombre.
L’expérience montre qu’il n’en n’est rien et que, qu'elle soit proche ou lointaine, la modification de la représentation, source commune de toutes les thérapies psy, reste efficace.
Nous retrouvons cette modification aussi bien dans les contes fantastico-mythologiques proposés par les shamans amazoniens que dans nos pratiques.
Par quels chemins possibles pouvons-nous modifier la représentation que le patient se fait de son problème dans le but d’accéder à une modification de son comportement et, si possible, d’aider à une restauration de l’état corporel ?
Encore une fois, nous allons retrouver un tronc commun de nombreuses thérapies.
Changer la croyance, le cadre de pensée du client
Causalité
La causalité ne doit pas être un traumatisme pour le thérapeute, bien qu’elle puisse l’être pour notre patient. Si pour lui la douleur s’origine dans un traumatisme générant une névrose traumatique, il faudra instituer une thérapie spécifique de cet aspect incluant par exemple une désensibilisation par les mouvements oculaires ou bien d’autres techniques.
Au cours de communications antérieures il m’a été quelques fois reproché que je ne devais faire référence qu’à de fausses douleurs ou à des douleurs imaginaires. J’ai compris que, par vraies douleurs, mes contradicteurs entendaient des douleurs à cause organique, plus particulièrement des douleurs liées à une maladie susceptible d’entraîner la mort. Pour m’occuper de cancéreux, de douleurs fantômes à la suite de blessures des troncs nerveux, voir même, de douleurs post-hémiplégie, j’affirme que l’organicité de la cause ne préjuge en rien de l’efficacité de l’aide que l’on peut apporter à ces patients, la seule limite que je poserais étant l’existence de réexcitation douloureuse, d’origine mécanique telle qu’on peut en voir dans les problèmes articulaires : il est plus intéressant de considérer alors qu’il s’agit d’une douleur aiguë réitérante survenant sur un fond de douleur chronique et de traiter chaque aspect de façon spécifique.
Croyances
Rechercher le sens que la douleur ou la cause alléguée a pour le patient est un temps très important. Vous ne pourrez certainement pas faire cela tout de suite car, le plus souvent, vous n’aurez alors droit qu’à une version officielle. Celle qui nous intéresse, c’est la version privée : c’est elle qui est structurante du comportement du patient et de la façon qu’il a de se comporter par rapport à sa douleur. Est-il une victime ou un coupable ? Sa souffrance a-t-elle un sens mystique, voire rédempteur pour telle ou telle personne ? Est-elle le prix à payer pour conserver son pouvoir de thérapeute ? Se sent il puni pour une faute réelle ou bien expie-t-il une faute qu’il ne connaît même pas, à moins que ce ne soit la faute d’un ancêtre ? Est-il la victime d’attaques de sorcellerie ? A moins que ce ne soit les effets d’un cataclysme vécu dans une vie antérieure ? Quelle que soit la version proposée, considérez-la avec respect. Il s’agit d’une représentation qui est beaucoup plus qu’une hypothèse pour le patient, elle est marquée pour lui du sceau de la vérité. Comme les valeurs morales personnelles, comme les croyances religieuses, ne les attaquez pas, respectez les. Par contre , il n’est jamais interdit , à l’occasion d’une anecdote , d’une métaphore , de proposer un recadrage qui fera que le sens de l’expérience douloureuse va se modifier et permettra ainsi un autre comportement à douleur égale.
Cette connaissance des croyances va vous permettre de dresser le catalogue des tentatives de solution qui ont échoué ; vous pourrez alors dire au patient : »au moins vous savez déjà ce qu’il est inutile de faire plus ; ce qui n’a pas marché ne marchera jamais , je crains bien que nous ne soyons amenés tous deux à nous mettre en recherche d’autres solutions , peut-être des solutions que vous ne connaissez pas encore , peut être des solutions que vous connaissez déjà sans savoir que ce sont des solutions efficaces . Je leur raconte alors l’histoire de cette mère qui injurie et frappe son enfant pour obtenir qu’il obéisse. Pourtant elle sait que la dernière fois qu’elle l’a pris par la gentillesse, il a si vite obéi et qu’après il a été si tendre ; mais elle l’a oublié et préfère recommencer ce qui n’a pas souvent marché, même avec elle quand elle était petite. Vous savez, les êtres humains sont souvent comme ça, ils oublient ce qui marche, ça serait si simple qu’ils puissent programmer leur inconscient pour pouvoir utiliser cette capacité. De cette façon, vous préparez le terrain pour vos interventions ultérieures, le germe est semé, la suggestion ainsi préparée sera plus facilement acceptée.
Changer la métaphore
Le travail de métaphorisation est une des pierres angulaires de la prise en charge de la douleur chronique.
Le questionnement a déjà mis en évidence les représentations du patient qui sont elles-mêmes des métaphores. Il n’y a pas besoin de beaucoup pousser pour qu’il puisse se représenter le muscle réellement tordu ou bien la tension musculaire comme celle des haubans qui tiennent un mât de bateau ou bien de ressentir cette gêne comme l’impression d’une barre de fer qui freine sa mobilité à l’intérieur de son bras.
A partir de cette construction métaphorique qui n’a pas besoin nécessairement d’une transe ratifiée, il suffira d’inciter le patient à se représenter en imagination cette métaphore, de lui proposer d’amplifier tout d’abord avant de lui proposer d’apprendre progressivement à diminuer(il semble qu’il soit plus facile pour le client d’accepter l’idée qu’il puisse augmenter la douleur, mais ce qu’il ne sait pas , c’est qu’en acceptant l’idée de l’augmenter , il accepte en même temps l’idée qu’il peut la modifier).
Vous pouvez alors négocier la proportion minimale de douleur qu’il peut réduire de manière perceptible pour lui. Par exemple un patient me racontait que, pour venir à bout cette barre de fer, il avait utilisé en imagination une scie à métaux. Au début, plus il sciait, plus il lui semblait que l’acier de cette barre devenait dur, il a fallu qu’il change de lame et à ce moment là il a pu commencer, morceau par morceau, à grignoter cette barre de fer. Un des écueils de cette métaphorisation en transe très légère est que très souvent les patients souhaitent un effet immédiat sur la douleur. L’utilisation de l’anesthésie à travers la métaphore du gant est un bon moyen de leur faire comprendre que le lâcher prise sur le symptôme peut être un bon moyen de le laisser se modifier.
« Contentez-vous du travail sur la représentation, le corps fera le reste ».
La métaphore peut être également corporelle : l’utilisation de l’anesthésie, de la lévitation d’une main où d’un bras peut être tout à fait utilisée pour créer une métaphore de changement. Si ces métaphores corporelles se construisent plus volontiers au cours d’une transe, il semble que la surprise manifestée par les patients lorsqu’ils découvrent les capacités de leur corps à avoir une motricité automatique, ou à réguler le tonus musculaire ou bien à déplacer physiquement le siège d’une douleur, suffise à concrétiser la réalité du changement.
D’ailleurs en règle générale ces métaphores corporelles sont utilisées pour ancrer les métaphores imaginatives, par exemple dans une implication : « et au fur et à mesure que votre main se soulève la douleur se déplace et devient plus légère ».
Il arrive également que j’utilise une fable métaphorique, j’invente alors une histoire congruente à celle du patient qui est souvent proche de ses fantaisies. Durant ce récit il va partir dans un monde imaginaire qui décalquera ses difficultés. Par exemple il peut partir faire une promenade sur un beau voilier. Durant cette promenade nous pouvons nous rendre compte qu’il y a besoin de régler les haubans ; de façon indirecte je suggère que le mât peut ressembler à la colonne vertébrale et de cette façon là nous réussissons à détendre relativement facilement les muscles de cette personne hyper tonique.
Au cours de ce voyage, il peut y arriver qu’il y ait des visiteurs indésirables dans le bateau sous la forme par exemple de fourmis s’il y a une douleur fourmillante ou bien de rongeurs s’il y a une douleur rongeante et nous serons amenés à faire toute une chasse à ces hôtes indésirables et à les jeter à l’eau. De façon surprenante la naïveté de ces histoires est très bien perçue en hypnose et diminue beaucoup la résistance des patients à se débarrasser à leur tour de leurs hôtes indésirables que sont les douleurs.
Donc quels sont les moyens techniques qui vont être le support de ces interventions ?
L'hypnose
L’hypnose, encore que ce mot apparaisse maladroit, mérite bien que l’on s’y intéresse un peu. Cet état particulier ne correspond pas aux effets du pouvoir d’un « hypnotiseur » sur un sujet, à l’égal de ce qui peut être observé en spectacle. En fait tout être humain sait se mettre en hypnose spontanément. C’est l’état dans lequel chacun d’entre nous se trouve s’il est fasciné par un film ou bien une conférence ou bien lorsqu’il conduit distraitement, l’esprit occupé par un sujet quelconque. Cette capacité de dépotentialiser une partie du champ habituellement conscient semble permettre une focalisation sur un spectacle par exemple mais également - et ceci qui nous intéresse en hypnose - sur son imaginaire ou sur telle ou telle sensation corporelle. Bref chacun sait se mettre en état d’hypnose pour utiliser à son profit sa capacité de focalisation.
Dès maintenant il apparaît très clairement que le monde de l’hypnose ne sera pas celui d’une action magique mais celui d’un grossissement, d’une amplification de ce qui est déjà à l’état d’ébauche ou potentiel.
Toutes les études qui ont été faites montrent qu’il n’y a pas de spécificité particulière de l’état d’hypnose qui n’est probablement qu’une formalisation culturellement déterminée d’un état de relation à soi-même ou à autrui. Ces indications permettent de comprendre qu’à de très nombreuses reprises dans la journée, chacun d’entre nous se met spontanément en hypnose mais comme cette transe n’est pas attestée par un observateur, elle n’est pas perçue à ce moment là comme un changement d’état.
Nous avons déjà vu qu’à de nombreux moments dans les entretiens, que ce soit lors du questionnaire ou bien même lorsque les patients s’occupent chez eux à augmenter leurs symptômes, ils sont amenés à construire spontanément des transes qui n’ont alors d’existence que dans le système de référence de l’observateur.
Effectivement, assez fréquemment, surtout avec des jeunes patients ayant une bonne capacité imaginative, je travaille sans ratifier aucune transe m’en tenant simplement à des procédures telles que la question miracle de SHAZER.
Par contre, s’il me semble qu’il n’y a pas beaucoup de ressources, si le patient n’a pas commencé à s’améliorer avant la première visite, s’il est difficile de trouver des exceptions et surtout de le convaincre que les exceptions existent, à ce moment-là, la ratification de la transe est déjà en elle-même une excellente métaphore de changement que le patient va pouvoir intégrer.
L’utilisation de la transe va être un bon moyen de créer des ressources. Il peut être intéressant d’aller d’une certaine façon « à la pêche », pour évaluer la capacité du patient à créer de l’anesthésie, de l’analgésie, de l’amnésie, de la dissociation, de la distorsion du temps, de vivre des modifications physiologiques, de déplacer sa douleur, de distraire son attention, surtout d’être capable d’anticiper vers un avenir sans douleur, ou avec une douleur réduite. La connaissance de ces éléments sera tout à fait utile pour construire les stratégies thérapeutiques. La ratification de la transe permettra aussi plus facilement de demander au patient de construire de l’auto-hypnose. Par ailleurs, il m’apparaît plus simple d’utiliser des transes ratifiées lorsqu’il est intéressant de créer un contexte d’amnésie ou bien des distorsions temporelles.
Quoi qu’il en soit, j’évite le plus souvent d’utiliser une procédure d’induction classique. A vrai dire, j’ai tendance à penser que si je n’étais pas capable de laisser le patient entrer en transe pendant l’entretien, ceci signifierait que je n’ai pas pu me « calibrer » avec lui, d’entrer dans son monde.
Il m’arrive quelquefois d’utiliser des inductions classiques dans le but d’échouer pour montrer de façon paradoxale à des patients avec des personnalités que nous pourrions qualifier d’hystériques ( ils sont en fait trop en hypnose), qu’ils ne sont pas faits pour utiliser cette technique, le message étant qu’ils contrôlent tellement les choses qu’ils ne peuvent pas faire l’hypnose, que pourtant ils demandent à corps et à cris.
Il m’arrive également d’apprendre aux patients à construire une auto-hypnose avec une technique de focalisation sensorielle simple qui leur permet de se mettre dans cet état sans avoir besoin d’être captés par leurs douleurs.
Je ne vais pas vous faire un cours sur l’hypnose, encore moins une formation sur ces techniques. Je vais plutôt tenter de vous exposer comment ces techniques fonctionnent et comment elles peuvent avoir un impact non seulement sur l’éprouvé douloureux, mais aussi sur le fonctionnement corporel.
Tout d’abord, une maladie, quelle qu’elle soit ne correspond pas dans sa réalité à une logique linéaire telle qu’une cause entraine un effet. Par exemple, quelque chose d’aussi simple qu’une blessure liée à un accident de la route verra son devenir pouvoir être profondément modifié selon que le blessé se sent une victime en droit de crier justice ou bien s’il est responsable. Selon le cas, les processus neuro humoraux immunitaires mis en jeu dans la guérison se trouveront profondément différents.
Quelques grands principes des Thérapie à entrée Psy
La maladie est systémique : toutes nos représentations linéaires sont fausses. Tout implique tout et réciproquement. De ce fait, même si quelquefois une logique linéaire permet de trouver des solutions, bien souvent, l’expérience montre qu’une intervention non logique porte des fruits. Comment expliquer sinon l’efficacité des cures thermales ou quelquefois d’une bonne intervention roborative ; l’effet quelquefois sidérant d’un deuil, l’existence maintenant indubitable de la réalité organique de l’effet placebo ?
Chaque logique thérapeutique a une voie d’entrée privilégiée dans le système déréglé qui produit une pathologie : Psy pour moi, corporel pour l’allopathie, etc.
Souvent, l’entrée se fera par l’abord de la plainte, et c’est souvent le cas en matière de douleur lorsque la construction pathologique est confuse ou échappe à une logique simple.
La plainte est systémique : ce n’est qu’un élément apparent d’un ensemble beaucoup plus complexe.
Elle est prise dans le réseau de croyances de la personne, c.-à-d. au sens que la personne lui donne.
Elle est liée à l'émotion et par là même à tout un système neuro humoral.
Le système nerveux est un organe de représentation: le réel nous est à tout jamais interdit ; le travail de type psy repose donc uniquement sur des représentations, ce qui pourrait au premier abord pouvoir le disqualifier puisque, d’une certaine façon, ce serait lâcher la proie pour l’ombre.
L’expérience montre qu’il n’en n’est rien et que, qu'elle soit proche ou lointaine, la modification de la représentation, source commune de toutes les thérapies psy, reste efficace.
Nous retrouvons cette modification aussi bien dans les contes fantastico-mythologiques proposés par les shamans amazoniens que dans nos pratiques.
Par quels chemins possibles pouvons-nous modifier la représentation que le patient se fait de son problème dans le but d’accéder à une modification de son comportement et, si possible, d’aider à une restauration de l’état corporel ?
Encore une fois, nous allons retrouver un tronc commun de nombreuses thérapies.
Changer la croyance, le cadre de pensée du client
Causalité
La causalité ne doit pas être un traumatisme pour le thérapeute, bien qu’elle puisse l’être pour notre patient. Si pour lui la douleur s’origine dans un traumatisme générant une névrose traumatique, il faudra instituer une thérapie spécifique de cet aspect incluant par exemple une désensibilisation par les mouvements oculaires ou bien d’autres techniques.
Au cours de communications antérieures il m’a été quelques fois reproché que je ne devais faire référence qu’à de fausses douleurs ou à des douleurs imaginaires. J’ai compris que, par vraies douleurs, mes contradicteurs entendaient des douleurs à cause organique, plus particulièrement des douleurs liées à une maladie susceptible d’entraîner la mort. Pour m’occuper de cancéreux, de douleurs fantômes à la suite de blessures des troncs nerveux, voir même, de douleurs post-hémiplégie, j’affirme que l’organicité de la cause ne préjuge en rien de l’efficacité de l’aide que l’on peut apporter à ces patients, la seule limite que je poserais étant l’existence de réexcitation douloureuse, d’origine mécanique telle qu’on peut en voir dans les problèmes articulaires : il est plus intéressant de considérer alors qu’il s’agit d’une douleur aiguë réitérante survenant sur un fond de douleur chronique et de traiter chaque aspect de façon spécifique.
Croyances
Rechercher le sens que la douleur ou la cause alléguée a pour le patient est un temps très important. Vous ne pourrez certainement pas faire cela tout de suite car, le plus souvent, vous n’aurez alors droit qu’à une version officielle. Celle qui nous intéresse, c’est la version privée : c’est elle qui est structurante du comportement du patient et de la façon qu’il a de se comporter par rapport à sa douleur. Est-il une victime ou un coupable ? Sa souffrance a-t-elle un sens mystique, voire rédempteur pour telle ou telle personne ? Est-elle le prix à payer pour conserver son pouvoir de thérapeute ? Se sent il puni pour une faute réelle ou bien expie-t-il une faute qu’il ne connaît même pas, à moins que ce ne soit la faute d’un ancêtre ? Est-il la victime d’attaques de sorcellerie ? A moins que ce ne soit les effets d’un cataclysme vécu dans une vie antérieure ? Quelle que soit la version proposée, considérez-la avec respect. Il s’agit d’une représentation qui est beaucoup plus qu’une hypothèse pour le patient, elle est marquée pour lui du sceau de la vérité. Comme les valeurs morales personnelles, comme les croyances religieuses, ne les attaquez pas, respectez les. Par contre , il n’est jamais interdit , à l’occasion d’une anecdote , d’une métaphore , de proposer un recadrage qui fera que le sens de l’expérience douloureuse va se modifier et permettra ainsi un autre comportement à douleur égale.
Cette connaissance des croyances va vous permettre de dresser le catalogue des tentatives de solution qui ont échoué ; vous pourrez alors dire au patient : »au moins vous savez déjà ce qu’il est inutile de faire plus ; ce qui n’a pas marché ne marchera jamais , je crains bien que nous ne soyons amenés tous deux à nous mettre en recherche d’autres solutions , peut-être des solutions que vous ne connaissez pas encore , peut être des solutions que vous connaissez déjà sans savoir que ce sont des solutions efficaces . Je leur raconte alors l’histoire de cette mère qui injurie et frappe son enfant pour obtenir qu’il obéisse. Pourtant elle sait que la dernière fois qu’elle l’a pris par la gentillesse, il a si vite obéi et qu’après il a été si tendre ; mais elle l’a oublié et préfère recommencer ce qui n’a pas souvent marché, même avec elle quand elle était petite. Vous savez, les êtres humains sont souvent comme ça, ils oublient ce qui marche, ça serait si simple qu’ils puissent programmer leur inconscient pour pouvoir utiliser cette capacité. De cette façon, vous préparez le terrain pour vos interventions ultérieures, le germe est semé, la suggestion ainsi préparée sera plus facilement acceptée.
Changer la métaphore
Le travail de métaphorisation est une des pierres angulaires de la prise en charge de la douleur chronique.
Le questionnement a déjà mis en évidence les représentations du patient qui sont elles-mêmes des métaphores. Il n’y a pas besoin de beaucoup pousser pour qu’il puisse se représenter le muscle réellement tordu ou bien la tension musculaire comme celle des haubans qui tiennent un mât de bateau ou bien de ressentir cette gêne comme l’impression d’une barre de fer qui freine sa mobilité à l’intérieur de son bras.
A partir de cette construction métaphorique qui n’a pas besoin nécessairement d’une transe ratifiée, il suffira d’inciter le patient à se représenter en imagination cette métaphore, de lui proposer d’amplifier tout d’abord avant de lui proposer d’apprendre progressivement à diminuer(il semble qu’il soit plus facile pour le client d’accepter l’idée qu’il puisse augmenter la douleur, mais ce qu’il ne sait pas , c’est qu’en acceptant l’idée de l’augmenter , il accepte en même temps l’idée qu’il peut la modifier).
Vous pouvez alors négocier la proportion minimale de douleur qu’il peut réduire de manière perceptible pour lui. Par exemple un patient me racontait que, pour venir à bout cette barre de fer, il avait utilisé en imagination une scie à métaux. Au début, plus il sciait, plus il lui semblait que l’acier de cette barre devenait dur, il a fallu qu’il change de lame et à ce moment là il a pu commencer, morceau par morceau, à grignoter cette barre de fer. Un des écueils de cette métaphorisation en transe très légère est que très souvent les patients souhaitent un effet immédiat sur la douleur. L’utilisation de l’anesthésie à travers la métaphore du gant est un bon moyen de leur faire comprendre que le lâcher prise sur le symptôme peut être un bon moyen de le laisser se modifier.
« Contentez-vous du travail sur la représentation, le corps fera le reste ».
La métaphore peut être également corporelle : l’utilisation de l’anesthésie, de la lévitation d’une main où d’un bras peut être tout à fait utilisée pour créer une métaphore de changement. Si ces métaphores corporelles se construisent plus volontiers au cours d’une transe, il semble que la surprise manifestée par les patients lorsqu’ils découvrent les capacités de leur corps à avoir une motricité automatique, ou à réguler le tonus musculaire ou bien à déplacer physiquement le siège d’une douleur, suffise à concrétiser la réalité du changement.
D’ailleurs en règle générale ces métaphores corporelles sont utilisées pour ancrer les métaphores imaginatives, par exemple dans une implication : « et au fur et à mesure que votre main se soulève la douleur se déplace et devient plus légère ».
Il arrive également que j’utilise une fable métaphorique, j’invente alors une histoire congruente à celle du patient qui est souvent proche de ses fantaisies. Durant ce récit il va partir dans un monde imaginaire qui décalquera ses difficultés. Par exemple il peut partir faire une promenade sur un beau voilier. Durant cette promenade nous pouvons nous rendre compte qu’il y a besoin de régler les haubans ; de façon indirecte je suggère que le mât peut ressembler à la colonne vertébrale et de cette façon là nous réussissons à détendre relativement facilement les muscles de cette personne hyper tonique.
Au cours de ce voyage, il peut y arriver qu’il y ait des visiteurs indésirables dans le bateau sous la forme par exemple de fourmis s’il y a une douleur fourmillante ou bien de rongeurs s’il y a une douleur rongeante et nous serons amenés à faire toute une chasse à ces hôtes indésirables et à les jeter à l’eau. De façon surprenante la naïveté de ces histoires est très bien perçue en hypnose et diminue beaucoup la résistance des patients à se débarrasser à leur tour de leurs hôtes indésirables que sont les douleurs.
Donc quels sont les moyens techniques qui vont être le support de ces interventions ?
L'hypnose
L’hypnose, encore que ce mot apparaisse maladroit, mérite bien que l’on s’y intéresse un peu. Cet état particulier ne correspond pas aux effets du pouvoir d’un « hypnotiseur » sur un sujet, à l’égal de ce qui peut être observé en spectacle. En fait tout être humain sait se mettre en hypnose spontanément. C’est l’état dans lequel chacun d’entre nous se trouve s’il est fasciné par un film ou bien une conférence ou bien lorsqu’il conduit distraitement, l’esprit occupé par un sujet quelconque. Cette capacité de dépotentialiser une partie du champ habituellement conscient semble permettre une focalisation sur un spectacle par exemple mais également - et ceci qui nous intéresse en hypnose - sur son imaginaire ou sur telle ou telle sensation corporelle. Bref chacun sait se mettre en état d’hypnose pour utiliser à son profit sa capacité de focalisation.
Dès maintenant il apparaît très clairement que le monde de l’hypnose ne sera pas celui d’une action magique mais celui d’un grossissement, d’une amplification de ce qui est déjà à l’état d’ébauche ou potentiel.
Toutes les études qui ont été faites montrent qu’il n’y a pas de spécificité particulière de l’état d’hypnose qui n’est probablement qu’une formalisation culturellement déterminée d’un état de relation à soi-même ou à autrui. Ces indications permettent de comprendre qu’à de très nombreuses reprises dans la journée, chacun d’entre nous se met spontanément en hypnose mais comme cette transe n’est pas attestée par un observateur, elle n’est pas perçue à ce moment là comme un changement d’état.
Nous avons déjà vu qu’à de nombreux moments dans les entretiens, que ce soit lors du questionnaire ou bien même lorsque les patients s’occupent chez eux à augmenter leurs symptômes, ils sont amenés à construire spontanément des transes qui n’ont alors d’existence que dans le système de référence de l’observateur.
Effectivement, assez fréquemment, surtout avec des jeunes patients ayant une bonne capacité imaginative, je travaille sans ratifier aucune transe m’en tenant simplement à des procédures telles que la question miracle de SHAZER.
Par contre, s’il me semble qu’il n’y a pas beaucoup de ressources, si le patient n’a pas commencé à s’améliorer avant la première visite, s’il est difficile de trouver des exceptions et surtout de le convaincre que les exceptions existent, à ce moment-là, la ratification de la transe est déjà en elle-même une excellente métaphore de changement que le patient va pouvoir intégrer.
L’utilisation de la transe va être un bon moyen de créer des ressources. Il peut être intéressant d’aller d’une certaine façon « à la pêche », pour évaluer la capacité du patient à créer de l’anesthésie, de l’analgésie, de l’amnésie, de la dissociation, de la distorsion du temps, de vivre des modifications physiologiques, de déplacer sa douleur, de distraire son attention, surtout d’être capable d’anticiper vers un avenir sans douleur, ou avec une douleur réduite. La connaissance de ces éléments sera tout à fait utile pour construire les stratégies thérapeutiques. La ratification de la transe permettra aussi plus facilement de demander au patient de construire de l’auto-hypnose. Par ailleurs, il m’apparaît plus simple d’utiliser des transes ratifiées lorsqu’il est intéressant de créer un contexte d’amnésie ou bien des distorsions temporelles.
Quoi qu’il en soit, j’évite le plus souvent d’utiliser une procédure d’induction classique. A vrai dire, j’ai tendance à penser que si je n’étais pas capable de laisser le patient entrer en transe pendant l’entretien, ceci signifierait que je n’ai pas pu me « calibrer » avec lui, d’entrer dans son monde.
Il m’arrive quelquefois d’utiliser des inductions classiques dans le but d’échouer pour montrer de façon paradoxale à des patients avec des personnalités que nous pourrions qualifier d’hystériques ( ils sont en fait trop en hypnose), qu’ils ne sont pas faits pour utiliser cette technique, le message étant qu’ils contrôlent tellement les choses qu’ils ne peuvent pas faire l’hypnose, que pourtant ils demandent à corps et à cris.
Il m’arrive également d’apprendre aux patients à construire une auto-hypnose avec une technique de focalisation sensorielle simple qui leur permet de se mettre dans cet état sans avoir besoin d’être captés par leurs douleurs.
Les techniques de thérapie brève
1/ INTERROGATOIRE
1/ nouer le contact
Tout d’abord il doit convaincre le patient de l’attention toute particulière que lui porte le médecin. Pour ce, la précision des questions, l’insistance sur des détails peut même apparaître quelquefois presque risible à un observateur par exemple lors d’une consultation publique. Mais elle est essentielle, compte tenu de la qualité de la relation que le thérapeute est capable de créer, pour qu’il puisse entrer dans le monde représentatif du patient.
2/ trouver et rendre évidentes les exceptions
Une autre visée va être de réduire le phénomène. Si d’emblée le patient vous annonce qu’il a mal en permanence, souvent le questionnement va vous permettre d’apprendre qu’il y a des moments où il fait moins de douleurs, par exemple quand ses enfants sont là, ou bien quand il y a un rayon de soleil, ou bien quand il s’occupe de son ordinateur, ou bien pendant son sommeil. Finalement, vous réussissez assez facilement à réduire une douleur officiellement permanente à seulement quelques heures par jour.
Dans la série diachronique vous trouvez des exceptions, il y a bien souvent des jours, ou même des périodes, durant lesquels les douleurs se sont évanouies comme par miracle, c’est très important alors de poser la question au patient de savoir comment il a fait pour les diminuer. Même s’il est incapable de vous répondre il va être confondu de votre certitude que c’est lui qui a fait quelque chose.
Dans cette rubrique, il est très important de se renseigner sur ce qui s’est passé pour sa douleur depuis l’appel téléphonique de demande de rendez-vous : dans un grand nombre de cas, de façon spontanée, il y a eu une amélioration. Ceci se marque surtout par ce que le patient a fait à la place ; on se rend compte qu’il a fait plus d’activités, qu’il a marché un peu plus. Bien souvent les patients cherchent à minimiser cette amélioration d’avant la consultation en faisant appel à des idées telles que l’effet placebo. J’en profite alors pour leur dire et leur expliquer que l’effet placebo n’est rien d’autre que la propre autorisation qu’ils se donnent d’utiliser spontanément leurs ressources pour venir à bout de la difficulté. Généralement suivent alors quelques considérations tirées de travaux scientifiques relatés dans la « psychobiologie de la guérison » de E. ROSSI ou tirés de photocopies diverses que je leur communique qui permettent de convaincre aisément le patient que ce qu’il ne croyait n’être que vil plomb de la suggestion est en fait l’or pur de ses propres ressources.
Le questionnement a également pour rôle de savoir ce que le patient veut. Contrairement à ce que l’évidence pourrait apporter, il apparaît que les patients sont très réalistes et ne veulent pas toujours la douleur zéro. Je pense, par exemple, à un homme qui avait noté une bonne efficacité des morphiniques dans les douleurs les plus fortes qu’il connaissait mais qui ne pouvait les utiliser pour les douleurs résiduelles certes faibles mais qui étaient devenues pour lui des plus gênantes : au lieu de me demander de supprimer 90% de la douleur il me demandait en fait simplement de l’aider à en supprimer 10%. Avouez que c’est quand même plus simple, encore faut-il le savoir.
3/ diviser pour régner
Le questionnement doit avoir pour but également de faire éclater le cadre d’une douleur en plusieurs petites douleurs, c’est là que tous les termes de le description des douleurs sont extrêmement intéressants et que le fait de se mettre à parler de la douleur tiraillante puis de la douleur brûlante, puis de la douleur arrachante devient quelque chose de tout à fait intéressant. Lorsque je commence à demander au patient s’il est capable de ressentir en même temps la douleur brûlante et la douleur tiraillante, il se rend compte très rapidement qu’il est difficile d’avoir présentes à la conscience en même temps plusieurs composantes de la douleur (dans le langage de la séance je dis que « vous ne pouvez pas avoir plusieurs douleurs en même temps). Généralement j’illustre cela par les pratiques des agriculteurs utilisant le tord-nez ou le mors indien sur un cheval pour se livrer à une intervention chirurgicale, la perception de l’animal étant tellement saturée par la douleur céphalique ainsi créée qu’il n’en ressent aucune autre.
Certains thérapeutes demandent si la douleur peut exister dans le creux poplité, zone que la personne ne connait pas, ou bien dans l’épiploon, zone tout autrement mystérieuse et semeuse de doute.
4/ Résultats
Si vous observez bien votre patient pendant ce questionnement vous noterez que son visage commence à devenir moins mobile, les mouvements de son corps sont moins nombreux, une phalange ou deux ont tendance à rester soulevées plus qu’il n’est nécessaire. Bref, il est déjà en train de se mettre en hypnose.
Avouez que c’est quand même bien utile : avec un questionnement bien fait, le patient commence à être en transe hypnotique, par ailleurs, ses problèmes absolument énormes n’existent plus que quelques heures par jour et, si vous avez habilement négocié, on ne vous demande plus que d’en réduire une part. De surcroît vous avez convaincu le patient qu’il était déjà capable de les régler, en tout cas qu’il en avait les capacités.
5/ Utilisation des échelles
Il est tout à fait intéressant d’utiliser également dans ce questionnement des échelles, qu’elles soient digitales c’est à dire chiffrées ou bien analogiques, le patient cochant de façon intuitive le niveau de sa douleur. Ces échelles sont également une excellente façon de préparer l’anticipation il suffit de mettre le trait juste un peu plus loin et de leur dire : « imaginez que vous êtes arrivés là ». Si vous posez les questions précisément, vous allez transporter votre patient dans l’anticipation du changement.
2/ CREER DES RESSOURCES
Vous avez permis à cet homme où à cette femme qui pensait ne rien changer à sa douleur, de se rendre compte qu’en fait qu’il avait beaucoup plus de capacités qu’il ne le croyait. Il est bien souvent utile alors de poser quelques questions sur ses ressources, sur ses loisirs, sur son projet de vie, il est souvent même intéressant de créer des ressources. Si le patient n’est pas totalement convaincu de sa capacité de créer une anesthésie, il est tout à fait aisé, après ce questionnaire, en profitant de cette transe légère sans avoir besoin de la ratifier, de suggérer au patient qu’il enfonce sa main dans seau d’eau glacée ou bien qu’il enfile un gant et créer ainsi une anesthésie de la main qui va le convaincre très aisément que par la simple force de son imagination, il est capable de créer des changements importants au niveau du ressenti de la douleur. Si l’anesthésie de la main n’est pas ou exceptionnellement un modèle utilisable par le patient pour calmer ses douleurs, ce qu’il observe dans sa main vient lui Prouver qu’il a la possibilité de changer quelque chose dans le monde de la douleur.
Cette certitude du changement peut également se construire sur l’apprentissage de la découverte des valeurs, des ressources.
3/ PROJETER DANS L’AVENIR
La certitude du changement ainsi créée, il va falloir la transporter dans l’avenir. Le style du questionnement utilisant le futur de l’indicatif et non le conditionnel, lié à la certitude du thérapeute en ce changement, est déjà très important. Projeter le patient dans l’avenir est également quelque chose de tout à fait essentiel sans avoir besoin pour cela de faire une anticipation dans la transe. Dans un certain nombre de cas, j’utilise la question miracle de STEVE DE SHAZER : (thérapeute Américain remarquable).
« Supposez que le problème est résolu, que, pendant votre sommeil, un miracle a eu lieu, quand vous vous réveillez, vous ne savez pas encore qu’il y a eu un miracle, à quoi allez vous le comprendre » ? Et notre brave homme est bien ahuri lorsqu’il se rend compte que les changements ne concernent pas que la douleur. Je ne suis pas certain en ce qui me concerne qu’il existe dans la séance un temps bien particulier pour l’anticipation, qui est plutôt un travail de « saupoudrage » à certains moments, qui ne fait que venir confirmer et augmenter des impressions, avant d’ancrer progressivement la certitude du changement à venir. A mon sens ce n’est que lorsque ce but est atteint que l’utilisation des techniques d’anticipation, que ce soit la question miracle de DE SHAZER où l’anticipation dans le cadre d’une transe hypnotique sont réellement utilisables.
4/ PRISE EN COMPTE DU CONTEXTE
Quel que soit le point de départ, même organique, d’un symptôme, la plainte est un phénomène complexe qui, dès son origine, s’inscrit dans le culturel. Si elle dure, la plainte va inéluctablement être prise dans le contexte relationnel de l’individu qui la porte. Au bout d’un certain temps, s’il y a lieu, l’utilisation relationnelle peut devenir prédominante. Ceci fait qu’une douleur peut fort bien persister alors que la lésion qui l’a créée a disparu.
Au niveau clinique, un bon signe de cette prédominance relationnelle est l’inefficacité des antalgiques majeurs. Plus le sujet vit dans un contexte ou la plainte est « utilisable » et lui donne un certain « pouvoir », plus la prise en compte relationnelle sera rapide, solide et difficile à mobiliser.
A contrario, plus le milieu de vie de la personne sera chaleureux et équilibré, plus le risque de relationnalisation pathologique de la plainte sera faible. Le plus généralement, il semble que le contexte relationnel familial soit la cible prédominante, mais ce n’est pas toujours le cas et il faudra alors travailler avec d’autres membres du réseau amical ou professionnel.
Dans un bon nombre de cas, heureusement, le milieu est mobilisable. A minima quelquefois une simple intervention de bon sens permettant par exemple la séparation des générations peut avoir une grande efficacité ; quelquefois il faudra mettre en évidence les loyautés invisibles notamment à des personnes disparues : là, l’utilisation de prescriptions telles que des lettres au défunt peuvent être tout à fait décisives.
Quelquefois le milieu familial n’apparaît pas mobilisable, ce qui est d’ailleurs plus du fait de l’incompétence de ma pratique que de la non-mobilisation possible de la famille. Dans ces cas là, j’ai tendance à faire des prescriptions homéostatiques, telle que la prescription du maintien de la plainte, soit directement, soit métaphoriquement. J’aime beaucoup alors conseiller aux patients de continuer à promener ostensiblement leur boîte de médicament, alors même qu’ils en prennent beaucoup moins. Après que le patient ait ainsi progressé à l’abri de ce « bouclier » il deviendra progressivement un cothérapeute d’autant plus compétent qu’il connaît bien le milieu sur lequel il travaille. Cette importance du contexte dans le travail avec la douleur chronique fait que très généralement, lors de la première consultation, j’établis un génogramme qui est un excellent support pour permettre d’emblée au patient de devoir prendre en compte la relationnalisation de sa plainte.
N’oubliez pas que cette approche contextuelle repose sur un champ d’hypothèses qui ne sont jamais que le fruit des projections intellectuelles du thérapeute qui attache souvent de l’importance à convaincre le patient de la justesse de ses vues. Peine perdue, il ne sert à rien d’avoir raison : ce qui compte c’est que la construction soit acceptable, tant par le patient que par le thérapeute ; elle n’a aucun besoin d’être vraie - si tant est que ce mot ait un sens- il ne s’agit que d’un édifice temporaire sur lequel va pouvoir s’appuyer le changement, et qui sera abandonné ensuite. A titre d’exemple, demandez à vos clients ce qui les a fait changer de leur point de vue : vous serez édifiés.
Bien souvent les patients viennent accompagnés et j’ai coutume de prendre en entretien les personnes présentes dans la salle d’attente. Je me fais là de puissants alliés, des cothérapeutes efficaces. Il m’arrive de travailler la séance comme une thérapie de couple ; souvent je compte sur l’à-propos des tiers qui ont tendance à utiliser la séance à leur profit et, de ce fait, créent un changement plus facile à obtenir qui, systémiquement, rendra plus probable le changement du patient « désigné » : par exemple un conjoint se mettra spontanément en transe hypnotique. Si j’ai réussi à connaître ou observer un petit problème qu’il présente, j’utilise cette transe pour l’améliorer. Ceci en fera un allié et d’autre part ce simple changement peut avoir un effet « boule de neige » qui améliorera le patient douloureux.
5/ PRESCRIPTIONS ET TACHES
Je ne vous parlerai pas des prescriptions involontaires et implicites qui passent à travers notre discours et qui font que le patient va utiliser tel où tel aspect de ce qui est dit pour modifier telle ou telle partie de sa vie. Encore que ceci puisse être utilisé pour faire des prescriptions saupoudrages ou bien indirectement en parlant de ce qu’un autre patient a fait pour lui, ce qui augmente de beaucoup l’efficacité de la prescription.
En effet je vois beaucoup de jeunes thérapeutes ericksonniens qui me parlent de prescriptions extrêmement provocantes et finalement pas acceptables par la personne. Je connais des thérapeutes exceptionnels qui ont un charisme tout à fait particulier qui fait que les patients vont faire effectivement pour eux des choses tout à fait surprenantes. Dans la réalité la plupart des thérapeutes n’en sont pas là, ils doivent proposer aux patients uniquement des prescriptions acceptables et pour le patient et pour eux -même.
En matière de douleur chronique, celles-ci sont habituellement simples dans ma pratique.
La plus fréquente est celle-ci : « Si vous faites bien volontairement ce que vous faites d’habitude involontairement vous aurez tendance à faire moins involontairement les symptômes ». Sur cette base exacte empiriquement exacte à défaut d’être logique, le patient reçoit la prescription d’augmenter sa douleur dans un moment d’isolement. Même si cette prescription apparaît « cruelle », elle est généralement bien acceptée parce que bien comprise.
Les prescriptions peuvent également être plus corporelles. Assez souvent je conseille aux patients de faire de l’auto-hypnose. Durant celle-ci, soit ils renouvellent des exercices qu’ils ont déjà faits, soit ils apprennent à travailler sur la métaphorisation dans le lâcher prise. En effet il est essentiel qu’ils acceptent l’idée qu’il faut renoncer à s’occuper de leur douleur pour se contenter d’agir sur les métaphores. J’aime bien leur expliquer alors que nous ne sommes pas dans le monde d’une réalité habituelle mais que nous sommes dans le monde d’Alice au pays des merveilles, où le corps prend les consignes au pied de la lettre.
Fréquemment je confie aux patients des tâches d’observation des changements. En effet, il faut savoir que, comme dans de beaucoup de problématiques, le vécu subjectif est lié à l’attention que les personnes portent à leurs difficultés. Dans le premier temps d’une douleur, il est fréquent que les patients, encore dans la projection active de leur vie, aient tendance à oublier les douleurs, ce qui fait que par exemple, ils ne vont venir consulter que très tard. Un beau jour un événement quelconque fait que cette douleur prend tout à coup de l’importance, se met à faire partie de leur « carte de visite »; à partir de ce moment là, ce ne sont plus les douleurs qu’ils vont oublier mais les moments d’amélioration et, de ce fait, le vécu subjectif de la douleur va devenir bien plus important. Au cours de la thérapie ou bien à l’occasion d’un autre événement, cette tendance peut tout à fait s’inverser et provoquer alors une amélioration qui peut être vue comme miraculeuse.
C’est là que ces tâches d’observation prennent tout leur poids : elles permettent au client de recadrer ses croyances à l’immuabilité de sa douleur en objectivant la variation et le changement. C’est ainsi que le journal de la douleur est intéressant, surtout s’il sert à questionner les périodes d’amélioration. De la même façon le relevé des prises quotidiennes de médicaments est un allié tout à fait efficace.
J’aime également beaucoup confier aux patients des tâches d’anticipation sous la forme par exemple d’une lettre de l’avenir qu’ils adressent à un de leurs amis proches. Dans cette lettre, ils racontent ce qu’ils vivent et cette description d’une vie sans douleur leur est tout à fait utile.
Des prescriptions, enfin, sont contextuelles. Je m’étendrai plus loin sur ce sujet mais d’emblée - vous avez sans doute déjà eu cette expérience - vous savez que la douleur est un symptôme et également l’occasion d’une communication ; bien souvent il faudra que les prescriptions tiennent compte de cet aspect relationnel notamment familial, de l’expression douloureuse pour être source de changement.
1/ INTERROGATOIRE
1/ nouer le contact
Tout d’abord il doit convaincre le patient de l’attention toute particulière que lui porte le médecin. Pour ce, la précision des questions, l’insistance sur des détails peut même apparaître quelquefois presque risible à un observateur par exemple lors d’une consultation publique. Mais elle est essentielle, compte tenu de la qualité de la relation que le thérapeute est capable de créer, pour qu’il puisse entrer dans le monde représentatif du patient.
2/ trouver et rendre évidentes les exceptions
Une autre visée va être de réduire le phénomène. Si d’emblée le patient vous annonce qu’il a mal en permanence, souvent le questionnement va vous permettre d’apprendre qu’il y a des moments où il fait moins de douleurs, par exemple quand ses enfants sont là, ou bien quand il y a un rayon de soleil, ou bien quand il s’occupe de son ordinateur, ou bien pendant son sommeil. Finalement, vous réussissez assez facilement à réduire une douleur officiellement permanente à seulement quelques heures par jour.
Dans la série diachronique vous trouvez des exceptions, il y a bien souvent des jours, ou même des périodes, durant lesquels les douleurs se sont évanouies comme par miracle, c’est très important alors de poser la question au patient de savoir comment il a fait pour les diminuer. Même s’il est incapable de vous répondre il va être confondu de votre certitude que c’est lui qui a fait quelque chose.
Dans cette rubrique, il est très important de se renseigner sur ce qui s’est passé pour sa douleur depuis l’appel téléphonique de demande de rendez-vous : dans un grand nombre de cas, de façon spontanée, il y a eu une amélioration. Ceci se marque surtout par ce que le patient a fait à la place ; on se rend compte qu’il a fait plus d’activités, qu’il a marché un peu plus. Bien souvent les patients cherchent à minimiser cette amélioration d’avant la consultation en faisant appel à des idées telles que l’effet placebo. J’en profite alors pour leur dire et leur expliquer que l’effet placebo n’est rien d’autre que la propre autorisation qu’ils se donnent d’utiliser spontanément leurs ressources pour venir à bout de la difficulté. Généralement suivent alors quelques considérations tirées de travaux scientifiques relatés dans la « psychobiologie de la guérison » de E. ROSSI ou tirés de photocopies diverses que je leur communique qui permettent de convaincre aisément le patient que ce qu’il ne croyait n’être que vil plomb de la suggestion est en fait l’or pur de ses propres ressources.
Le questionnement a également pour rôle de savoir ce que le patient veut. Contrairement à ce que l’évidence pourrait apporter, il apparaît que les patients sont très réalistes et ne veulent pas toujours la douleur zéro. Je pense, par exemple, à un homme qui avait noté une bonne efficacité des morphiniques dans les douleurs les plus fortes qu’il connaissait mais qui ne pouvait les utiliser pour les douleurs résiduelles certes faibles mais qui étaient devenues pour lui des plus gênantes : au lieu de me demander de supprimer 90% de la douleur il me demandait en fait simplement de l’aider à en supprimer 10%. Avouez que c’est quand même plus simple, encore faut-il le savoir.
3/ diviser pour régner
Le questionnement doit avoir pour but également de faire éclater le cadre d’une douleur en plusieurs petites douleurs, c’est là que tous les termes de le description des douleurs sont extrêmement intéressants et que le fait de se mettre à parler de la douleur tiraillante puis de la douleur brûlante, puis de la douleur arrachante devient quelque chose de tout à fait intéressant. Lorsque je commence à demander au patient s’il est capable de ressentir en même temps la douleur brûlante et la douleur tiraillante, il se rend compte très rapidement qu’il est difficile d’avoir présentes à la conscience en même temps plusieurs composantes de la douleur (dans le langage de la séance je dis que « vous ne pouvez pas avoir plusieurs douleurs en même temps). Généralement j’illustre cela par les pratiques des agriculteurs utilisant le tord-nez ou le mors indien sur un cheval pour se livrer à une intervention chirurgicale, la perception de l’animal étant tellement saturée par la douleur céphalique ainsi créée qu’il n’en ressent aucune autre.
Certains thérapeutes demandent si la douleur peut exister dans le creux poplité, zone que la personne ne connait pas, ou bien dans l’épiploon, zone tout autrement mystérieuse et semeuse de doute.
4/ Résultats
Si vous observez bien votre patient pendant ce questionnement vous noterez que son visage commence à devenir moins mobile, les mouvements de son corps sont moins nombreux, une phalange ou deux ont tendance à rester soulevées plus qu’il n’est nécessaire. Bref, il est déjà en train de se mettre en hypnose.
Avouez que c’est quand même bien utile : avec un questionnement bien fait, le patient commence à être en transe hypnotique, par ailleurs, ses problèmes absolument énormes n’existent plus que quelques heures par jour et, si vous avez habilement négocié, on ne vous demande plus que d’en réduire une part. De surcroît vous avez convaincu le patient qu’il était déjà capable de les régler, en tout cas qu’il en avait les capacités.
5/ Utilisation des échelles
Il est tout à fait intéressant d’utiliser également dans ce questionnement des échelles, qu’elles soient digitales c’est à dire chiffrées ou bien analogiques, le patient cochant de façon intuitive le niveau de sa douleur. Ces échelles sont également une excellente façon de préparer l’anticipation il suffit de mettre le trait juste un peu plus loin et de leur dire : « imaginez que vous êtes arrivés là ». Si vous posez les questions précisément, vous allez transporter votre patient dans l’anticipation du changement.
2/ CREER DES RESSOURCES
Vous avez permis à cet homme où à cette femme qui pensait ne rien changer à sa douleur, de se rendre compte qu’en fait qu’il avait beaucoup plus de capacités qu’il ne le croyait. Il est bien souvent utile alors de poser quelques questions sur ses ressources, sur ses loisirs, sur son projet de vie, il est souvent même intéressant de créer des ressources. Si le patient n’est pas totalement convaincu de sa capacité de créer une anesthésie, il est tout à fait aisé, après ce questionnaire, en profitant de cette transe légère sans avoir besoin de la ratifier, de suggérer au patient qu’il enfonce sa main dans seau d’eau glacée ou bien qu’il enfile un gant et créer ainsi une anesthésie de la main qui va le convaincre très aisément que par la simple force de son imagination, il est capable de créer des changements importants au niveau du ressenti de la douleur. Si l’anesthésie de la main n’est pas ou exceptionnellement un modèle utilisable par le patient pour calmer ses douleurs, ce qu’il observe dans sa main vient lui Prouver qu’il a la possibilité de changer quelque chose dans le monde de la douleur.
Cette certitude du changement peut également se construire sur l’apprentissage de la découverte des valeurs, des ressources.
3/ PROJETER DANS L’AVENIR
La certitude du changement ainsi créée, il va falloir la transporter dans l’avenir. Le style du questionnement utilisant le futur de l’indicatif et non le conditionnel, lié à la certitude du thérapeute en ce changement, est déjà très important. Projeter le patient dans l’avenir est également quelque chose de tout à fait essentiel sans avoir besoin pour cela de faire une anticipation dans la transe. Dans un certain nombre de cas, j’utilise la question miracle de STEVE DE SHAZER : (thérapeute Américain remarquable).
« Supposez que le problème est résolu, que, pendant votre sommeil, un miracle a eu lieu, quand vous vous réveillez, vous ne savez pas encore qu’il y a eu un miracle, à quoi allez vous le comprendre » ? Et notre brave homme est bien ahuri lorsqu’il se rend compte que les changements ne concernent pas que la douleur. Je ne suis pas certain en ce qui me concerne qu’il existe dans la séance un temps bien particulier pour l’anticipation, qui est plutôt un travail de « saupoudrage » à certains moments, qui ne fait que venir confirmer et augmenter des impressions, avant d’ancrer progressivement la certitude du changement à venir. A mon sens ce n’est que lorsque ce but est atteint que l’utilisation des techniques d’anticipation, que ce soit la question miracle de DE SHAZER où l’anticipation dans le cadre d’une transe hypnotique sont réellement utilisables.
4/ PRISE EN COMPTE DU CONTEXTE
Quel que soit le point de départ, même organique, d’un symptôme, la plainte est un phénomène complexe qui, dès son origine, s’inscrit dans le culturel. Si elle dure, la plainte va inéluctablement être prise dans le contexte relationnel de l’individu qui la porte. Au bout d’un certain temps, s’il y a lieu, l’utilisation relationnelle peut devenir prédominante. Ceci fait qu’une douleur peut fort bien persister alors que la lésion qui l’a créée a disparu.
Au niveau clinique, un bon signe de cette prédominance relationnelle est l’inefficacité des antalgiques majeurs. Plus le sujet vit dans un contexte ou la plainte est « utilisable » et lui donne un certain « pouvoir », plus la prise en compte relationnelle sera rapide, solide et difficile à mobiliser.
A contrario, plus le milieu de vie de la personne sera chaleureux et équilibré, plus le risque de relationnalisation pathologique de la plainte sera faible. Le plus généralement, il semble que le contexte relationnel familial soit la cible prédominante, mais ce n’est pas toujours le cas et il faudra alors travailler avec d’autres membres du réseau amical ou professionnel.
Dans un bon nombre de cas, heureusement, le milieu est mobilisable. A minima quelquefois une simple intervention de bon sens permettant par exemple la séparation des générations peut avoir une grande efficacité ; quelquefois il faudra mettre en évidence les loyautés invisibles notamment à des personnes disparues : là, l’utilisation de prescriptions telles que des lettres au défunt peuvent être tout à fait décisives.
Quelquefois le milieu familial n’apparaît pas mobilisable, ce qui est d’ailleurs plus du fait de l’incompétence de ma pratique que de la non-mobilisation possible de la famille. Dans ces cas là, j’ai tendance à faire des prescriptions homéostatiques, telle que la prescription du maintien de la plainte, soit directement, soit métaphoriquement. J’aime beaucoup alors conseiller aux patients de continuer à promener ostensiblement leur boîte de médicament, alors même qu’ils en prennent beaucoup moins. Après que le patient ait ainsi progressé à l’abri de ce « bouclier » il deviendra progressivement un cothérapeute d’autant plus compétent qu’il connaît bien le milieu sur lequel il travaille. Cette importance du contexte dans le travail avec la douleur chronique fait que très généralement, lors de la première consultation, j’établis un génogramme qui est un excellent support pour permettre d’emblée au patient de devoir prendre en compte la relationnalisation de sa plainte.
N’oubliez pas que cette approche contextuelle repose sur un champ d’hypothèses qui ne sont jamais que le fruit des projections intellectuelles du thérapeute qui attache souvent de l’importance à convaincre le patient de la justesse de ses vues. Peine perdue, il ne sert à rien d’avoir raison : ce qui compte c’est que la construction soit acceptable, tant par le patient que par le thérapeute ; elle n’a aucun besoin d’être vraie - si tant est que ce mot ait un sens- il ne s’agit que d’un édifice temporaire sur lequel va pouvoir s’appuyer le changement, et qui sera abandonné ensuite. A titre d’exemple, demandez à vos clients ce qui les a fait changer de leur point de vue : vous serez édifiés.
Bien souvent les patients viennent accompagnés et j’ai coutume de prendre en entretien les personnes présentes dans la salle d’attente. Je me fais là de puissants alliés, des cothérapeutes efficaces. Il m’arrive de travailler la séance comme une thérapie de couple ; souvent je compte sur l’à-propos des tiers qui ont tendance à utiliser la séance à leur profit et, de ce fait, créent un changement plus facile à obtenir qui, systémiquement, rendra plus probable le changement du patient « désigné » : par exemple un conjoint se mettra spontanément en transe hypnotique. Si j’ai réussi à connaître ou observer un petit problème qu’il présente, j’utilise cette transe pour l’améliorer. Ceci en fera un allié et d’autre part ce simple changement peut avoir un effet « boule de neige » qui améliorera le patient douloureux.
5/ PRESCRIPTIONS ET TACHES
Je ne vous parlerai pas des prescriptions involontaires et implicites qui passent à travers notre discours et qui font que le patient va utiliser tel où tel aspect de ce qui est dit pour modifier telle ou telle partie de sa vie. Encore que ceci puisse être utilisé pour faire des prescriptions saupoudrages ou bien indirectement en parlant de ce qu’un autre patient a fait pour lui, ce qui augmente de beaucoup l’efficacité de la prescription.
En effet je vois beaucoup de jeunes thérapeutes ericksonniens qui me parlent de prescriptions extrêmement provocantes et finalement pas acceptables par la personne. Je connais des thérapeutes exceptionnels qui ont un charisme tout à fait particulier qui fait que les patients vont faire effectivement pour eux des choses tout à fait surprenantes. Dans la réalité la plupart des thérapeutes n’en sont pas là, ils doivent proposer aux patients uniquement des prescriptions acceptables et pour le patient et pour eux -même.
En matière de douleur chronique, celles-ci sont habituellement simples dans ma pratique.
La plus fréquente est celle-ci : « Si vous faites bien volontairement ce que vous faites d’habitude involontairement vous aurez tendance à faire moins involontairement les symptômes ». Sur cette base exacte empiriquement exacte à défaut d’être logique, le patient reçoit la prescription d’augmenter sa douleur dans un moment d’isolement. Même si cette prescription apparaît « cruelle », elle est généralement bien acceptée parce que bien comprise.
Les prescriptions peuvent également être plus corporelles. Assez souvent je conseille aux patients de faire de l’auto-hypnose. Durant celle-ci, soit ils renouvellent des exercices qu’ils ont déjà faits, soit ils apprennent à travailler sur la métaphorisation dans le lâcher prise. En effet il est essentiel qu’ils acceptent l’idée qu’il faut renoncer à s’occuper de leur douleur pour se contenter d’agir sur les métaphores. J’aime bien leur expliquer alors que nous ne sommes pas dans le monde d’une réalité habituelle mais que nous sommes dans le monde d’Alice au pays des merveilles, où le corps prend les consignes au pied de la lettre.
Fréquemment je confie aux patients des tâches d’observation des changements. En effet, il faut savoir que, comme dans de beaucoup de problématiques, le vécu subjectif est lié à l’attention que les personnes portent à leurs difficultés. Dans le premier temps d’une douleur, il est fréquent que les patients, encore dans la projection active de leur vie, aient tendance à oublier les douleurs, ce qui fait que par exemple, ils ne vont venir consulter que très tard. Un beau jour un événement quelconque fait que cette douleur prend tout à coup de l’importance, se met à faire partie de leur « carte de visite »; à partir de ce moment là, ce ne sont plus les douleurs qu’ils vont oublier mais les moments d’amélioration et, de ce fait, le vécu subjectif de la douleur va devenir bien plus important. Au cours de la thérapie ou bien à l’occasion d’un autre événement, cette tendance peut tout à fait s’inverser et provoquer alors une amélioration qui peut être vue comme miraculeuse.
C’est là que ces tâches d’observation prennent tout leur poids : elles permettent au client de recadrer ses croyances à l’immuabilité de sa douleur en objectivant la variation et le changement. C’est ainsi que le journal de la douleur est intéressant, surtout s’il sert à questionner les périodes d’amélioration. De la même façon le relevé des prises quotidiennes de médicaments est un allié tout à fait efficace.
J’aime également beaucoup confier aux patients des tâches d’anticipation sous la forme par exemple d’une lettre de l’avenir qu’ils adressent à un de leurs amis proches. Dans cette lettre, ils racontent ce qu’ils vivent et cette description d’une vie sans douleur leur est tout à fait utile.
Des prescriptions, enfin, sont contextuelles. Je m’étendrai plus loin sur ce sujet mais d’emblée - vous avez sans doute déjà eu cette expérience - vous savez que la douleur est un symptôme et également l’occasion d’une communication ; bien souvent il faudra que les prescriptions tiennent compte de cet aspect relationnel notamment familial, de l’expression douloureuse pour être source de changement.
EMDR HTSMA
Présentation
L'EMDR est un protocole associant thérapies cognitives et hypnose. Devant les limites du modèle, le docteur Éric Bardot et ses collègues ont créé le modèle de HTSMA (hypnose, thérapies stratégiques, mouvement alternatifs) qui est un modèle intégratif de l'hypnose, de l'EMDR, des différentes thérapies brèves. Ce modèle à de nombreuses applications dans le monde de la psychothérapie.
Spécificité avec la douleur
Parmi les douloureux, j’ai retrouvé un grand nombre de syndromes post-traumatiques liés soit à l’origine traumatique de la lésion provenant par exemple d’un accident, mais aussi liés à l’intensité toute particulière des douleurs au début de la maladie. C’est le cas tout particulièrement de certains migraineux, de certaines formes d’entrée dans la fibromyalgie (encore que ce diagnostic pourtant bien utile soit contesté par certains), de certaine douleurs du petit bassin consécutives par exemple à des échecs de l’anesthésie péridurale pendant un accouchement.
Dans ces cas , les cognitions négatives portent souvent autour de l’absence de maîtrise , de l’anticipation négative des douleurs à venir , et bien sûr de toutes sortes de croyances concernant le sens de la douleur , qu’il soit celui de la faute , du péché , ou bien de l’attaque de sorcellerie.
Avant tout autre travail sur la douleur , mais après avoir prouvé au patient qu’il était lui même capable de modifier ses douleurs en lui faisant par exemple reconnaître qu’il présente des moments d’analgésie spontanée , ne serait ce qu’à l’occasion d’une distraction ou bien d’une émotion forte telle que la peur , vous pouvez alors travailler en désensibilisation standard , afin d’installer des cognitions positives plus adaptatives , toutes choses étant égales par ailleurs notamment au niveau de la douleur.
Je n’aurai pas la place de vous exposer ici la totalité du travail avec la douleur qui nécessite la connaissance des techniques d’hypnose et de thérapie familiale et stratégique ou brève , mais il est une autre partie accessible même aux non familiers de ce genre de pratique pour laquelle HTSMA est un apport tout à fait intéressant : la métaphorisation.
Vous avez sans doute déjà éprouvé une douleur et tenté de communiquer votre expérience à un tiers. Dans ce domaine, seules les comparaisons sont une communication qui semble partageable. Et qui de comparer sa douleur à un étau, à un crabe, à une brûlure par une flamme ou bien n’importe quoi d’autre qui fasse image. Quand vous avez obtenu cette représentation métaphorique accompagnée ou non de son cortège de cognitions négatives , vous pouvez alors faire quelques séries de mouvements oculaires , de taping ou autre alternance et assez souvent , vous verrez la métaphore diminuer , s’apprivoiser en s’accompagnant d’une réduction stable de la douleur.
Pour ceux qui connaissent le travail avec l’hypnose, la méthode fonctionne semble-t-il mieux que cette dernière dans les douleurs regroupées sous le nom de chroniques bénignes par J Barber, c’est à dire ces douleurs résurgentes après un intervalle libre de quelques mois après l’accident causal invoqué comme origine du statut de victime.
Et l’algodystrophie ?
Quelles sont les particularités de l’algodystrophie ?
Il y a une douleur, bien sûr, et celle ci va plutôt impliquer un travail plus adapté à des douleurs mécaniques que chroniques simples.
Il y a des signes fonctionnels.
Ceux ci vont soit être accessibles par la métaphorisation comme la douleur, soit par un travail plus direct d’hypnose, tel qu’à minima obtenir des modifications des sensations thermiques dans le membre malade.
Toutes ces sensations, origine d’une gêne importante, vont s’accompagner d’un vécu pessimiste correspondant à des cognitions négatives qu’il faudra faire changer par un travail de recadrage ou par un travail d’EMDR.
Quelles que soient les techniques utilisées, il faudra arriver à une anticipation positive et concrète, d’autant plus importante ici que la longueur de l’impotence a souvent effacé du schéma mental toutes les représentations liées au membre malade.
Ce travail minutieux, concret, suivi d’un questionnement systématique, permettra au patient de se représenter le changement, d’y croire et enfin de faire les efforts nécessaires pour qu’il se produise.
Présentation
L'EMDR est un protocole associant thérapies cognitives et hypnose. Devant les limites du modèle, le docteur Éric Bardot et ses collègues ont créé le modèle de HTSMA (hypnose, thérapies stratégiques, mouvement alternatifs) qui est un modèle intégratif de l'hypnose, de l'EMDR, des différentes thérapies brèves. Ce modèle à de nombreuses applications dans le monde de la psychothérapie.
Spécificité avec la douleur
Parmi les douloureux, j’ai retrouvé un grand nombre de syndromes post-traumatiques liés soit à l’origine traumatique de la lésion provenant par exemple d’un accident, mais aussi liés à l’intensité toute particulière des douleurs au début de la maladie. C’est le cas tout particulièrement de certains migraineux, de certaines formes d’entrée dans la fibromyalgie (encore que ce diagnostic pourtant bien utile soit contesté par certains), de certaine douleurs du petit bassin consécutives par exemple à des échecs de l’anesthésie péridurale pendant un accouchement.
Dans ces cas , les cognitions négatives portent souvent autour de l’absence de maîtrise , de l’anticipation négative des douleurs à venir , et bien sûr de toutes sortes de croyances concernant le sens de la douleur , qu’il soit celui de la faute , du péché , ou bien de l’attaque de sorcellerie.
Avant tout autre travail sur la douleur , mais après avoir prouvé au patient qu’il était lui même capable de modifier ses douleurs en lui faisant par exemple reconnaître qu’il présente des moments d’analgésie spontanée , ne serait ce qu’à l’occasion d’une distraction ou bien d’une émotion forte telle que la peur , vous pouvez alors travailler en désensibilisation standard , afin d’installer des cognitions positives plus adaptatives , toutes choses étant égales par ailleurs notamment au niveau de la douleur.
Je n’aurai pas la place de vous exposer ici la totalité du travail avec la douleur qui nécessite la connaissance des techniques d’hypnose et de thérapie familiale et stratégique ou brève , mais il est une autre partie accessible même aux non familiers de ce genre de pratique pour laquelle HTSMA est un apport tout à fait intéressant : la métaphorisation.
Vous avez sans doute déjà éprouvé une douleur et tenté de communiquer votre expérience à un tiers. Dans ce domaine, seules les comparaisons sont une communication qui semble partageable. Et qui de comparer sa douleur à un étau, à un crabe, à une brûlure par une flamme ou bien n’importe quoi d’autre qui fasse image. Quand vous avez obtenu cette représentation métaphorique accompagnée ou non de son cortège de cognitions négatives , vous pouvez alors faire quelques séries de mouvements oculaires , de taping ou autre alternance et assez souvent , vous verrez la métaphore diminuer , s’apprivoiser en s’accompagnant d’une réduction stable de la douleur.
Pour ceux qui connaissent le travail avec l’hypnose, la méthode fonctionne semble-t-il mieux que cette dernière dans les douleurs regroupées sous le nom de chroniques bénignes par J Barber, c’est à dire ces douleurs résurgentes après un intervalle libre de quelques mois après l’accident causal invoqué comme origine du statut de victime.
Et l’algodystrophie ?
Quelles sont les particularités de l’algodystrophie ?
Il y a une douleur, bien sûr, et celle ci va plutôt impliquer un travail plus adapté à des douleurs mécaniques que chroniques simples.
Il y a des signes fonctionnels.
Ceux ci vont soit être accessibles par la métaphorisation comme la douleur, soit par un travail plus direct d’hypnose, tel qu’à minima obtenir des modifications des sensations thermiques dans le membre malade.
Toutes ces sensations, origine d’une gêne importante, vont s’accompagner d’un vécu pessimiste correspondant à des cognitions négatives qu’il faudra faire changer par un travail de recadrage ou par un travail d’EMDR.
Quelles que soient les techniques utilisées, il faudra arriver à une anticipation positive et concrète, d’autant plus importante ici que la longueur de l’impotence a souvent effacé du schéma mental toutes les représentations liées au membre malade.
Ce travail minutieux, concret, suivi d’un questionnement systématique, permettra au patient de se représenter le changement, d’y croire et enfin de faire les efforts nécessaires pour qu’il se produise.
Une approche identique, mais différente sur ...